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traversay1
3 538 abonnés
4 821 critiques
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4,5
Publiée le 16 octobre 2020
Le titre du nouveau film de la talentueuse réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania (Le Challat de Tunis, La belle et la meute) est singulier et intrigant : L'homme qui a vendu sa peau. Et la fable qu'il raconte ne l'est pas moins, original et très actuel, avec son héros syrien au tatouage dans le dos, mais aussi universel par son thème récurrent dans la littérature et le cinéma : le pacte méphistophélique. Le projet est excitant et moderne parce qu'il est parfaitement fidèle à notre époque étrange "où les marchandisent circulent mieux que les individus." C'est aussi un formidable film sur le pouvoir de l'art et ses limites avec son caractère provocateur et mercantile. Ceci fait que L'homme qui a vendu sa peau peut-être considéré, toute proportions gardées, comme un cousin d'une récente Palme d'Or, The Square. La dignité de l'homme et sa liberté relative face à une société cynique et récupératrice sont au cœur d'un récit admirablement construit et qui surprend constamment. S'y ajoute une histoire d'amour, plus convenue, mais qui ramène un peu d'humanité dans ce monde où la dictature de l'instant, de la publicité et du buzz imposent leur loi d'airain. Remarquablement scénarisé, L'homme qui a vendu sa peau est aussi un bel objet esthétique, mis en scène avec goût et virtuosité. Outre Monica Bellucci, très sobre, le film permet à deux acteurs peu ou pas connus de briller : la débutante Dea Liane et surtout l'ébouriffant Yahya Mahayni qui porte littéralement le film sur son dos !
Fable critique de l'art moderne qui diabolise le mercantilisme. Cet objet d'art vivant existera grâce à une manipulation sordide : il pourra fuir la Syrie et aller voir sa bien-aîmée avec un VISA international sur le dos. Mais ce pacte le transformera en "bête de foire". Pour s'en libérer il devra inventer un nouveau tour de passe-passe. Le scénario est habile et la beauté formelle est remarquable.
L’Homme qui a vendu sa peau trouve dans l’art et son marché un biais audacieux au travers duquel aborder d’une part la migration causée par les régimes dictatoriaux et terroristes, d’autre part notre regard occidental sur ces réfugiés. La valeur du film de Kaouther Ben Hania tient justement à faire du scandale artistique un moyen de renouveler notre regard sur une réalité que nous méconnaissons et qui nous laisse souvent indifférents : il faut que le corps du migrant s’expose, s’exhibe, dénudé devant des foules, entouré d’objets hors de prix, pour que le spectateur se rappelle qu’il a ce corps en commun, pour qu’il s’interroge sur l’esthétique et les limites éthiques de son expression. Il y a donc à la fois dénonciation des travers de l’art contemporain et éloge de la puissance des paradoxes que l’art contemporain soulève, soit l’idée selon laquelle exploiter un être humain en faisant de lui un modèle lui permet de recouvrer son humanité et sa liberté. Nous reconnaissons là un même réquisitoire contre l’hypocrisie d’une certaine élite intellectuelle que menait il y a peu Ruben Östlund dans The Square (2017), dans la confusion entre un happening et la réalité, dans l’irruption de la bestialité primitive au sein d’un cadre normé et aseptisé – l’homme-primate d’un côté, le terroriste aux oreillettes de l’autre. L’intelligence du film de Kaouther Ben Hania réside également dans l’intrigue sentimentale qu’il tisse en parallèle et qui offre un fil directeur à la révolte de Sam Ali : la prostitution de son dos n’a d’égale que le mariage forcé d’Abeer, quoique la première ouvre à terme une porte de sortie et permette la réunion des deux amants. Malgré facilités, lourdeurs et répétitions, L’Homme qui a vendu sa peau s’affirme telle une œuvre audacieuse et mise en scène avec talent qui s’empare d’un problème de société pour mieux l’insérer dans une réflexion plus générale sur l’esthétique contemporaine.
Ce film raconte l'histoire étonnante et très originale de ce syrien qui parvient à émigrer en Europe grâce à l'art contemporain. Le scénario très bien construit est basé à partir de l'histoire vraie d'un suisse dont le tatouage sur son corps était devenu un chef d'oeuvre présenté dans les musées internationaux. La réalisation et l'interprétation sont soignés et réussis. Le film de cette réalisatrice tunisienne fait très bien ressortir les réalités extrêmes entre la survie dans un pays en guerre et les espérances douloureuses d'un exilé avec en fil rouge une belle histoire d'amour. Le film commence en Syrie et finit dans la folie de l'art contemporain où la réalisatrice jette un regard très critique.
Pas grand chose à dire sur ce film , le sujet et la critique m’ont motivé mais au final le film est pas assez rythmé, on a du mal à comprendre le sens que veut donner le réa à son film , le final sauve un peu le tout .
Inspirée librement d’une histoire vraie et servie par une mise en scène brillante, une fable aussi déroutante qu’audacieuse et intrigante, qui traite aussi bien du pouvoir de l’art et de ses limites ,que du regard occidental sur les réfugiés (avec une partie sentimentale plus convenue). 3,25
Un film intrigant, enveloppé de nombreux mystères, bousculant les codes de la bien-pensance avec un savoureux cynisme. Un reflet dérangeant de notre monde, où les limites de l'acceptable ne sont plus qu'un vague concept. Un cinéma puissant.
Après "The Square", une autre fable moderne sur le rapport à l'art et à l'argent du grand capital. Déroutant, cynique et prenant. Et c'est globalement bien filmé avec tout un travail de mise en scène sur le hors champ, le reflet, le flou artistique. Seule l'histoire d'amour manque franchement d'épaisseur mais le tout est assez recommandable.
spoiler: A travers sa conduite, son intrigue et le personnage principal, l'homme qui a vendu sa peau, le film évoque la création artistique et la précarité. Cet homme qui a vendu sa peau est interprété par Yahya Mahayni, qui est tout en subtilité. Nous comprenons ses motivations à travers ses comportements. Mais son personnage garde une part de mystère, ce qui maintient l'empathie et l'intérêt du spectateur. Il y des motivations très élémentaires : sauver sa peau d'immigré, retrouver un amour. Mais le personnages ajoute de petites touches qui font qu'il ne peut être réduit à ces deux motivations.
Le film pose une question intéressante à une époque où les tatouages sont généralisés. Ici, un artiste reconnu (Koen De Bouw, tout en ironie) tatoue le dos d'un immigrés syrien. Le tatouage est un passeport. L'oeuvre est le tatouage mais aussi la peau de l'individu tatoué. Il a un contrat où il doit se présenter à intervalle régulier à des expositions, où il est exposé lui même : il montre son dos. Puis il est vendu. Problématique de marchandisation de l'individu, qui peut être une métaphore pour d'autres problématique de marchandisation des corps. Un film subtile et riche de thèmes multiples.
Une parabole qui nous interroge sur la valeur de la vie humaine que l’on soit né à Bruxelles ou à Damas et, en même temps, jusqu’où peut-on aller pour sauver sa… peau. A voir. Absolument.