Après avoir laissé François Civil sur le bitume de « Burn Out », Yann Gozlan retrouve sa tête d’affiche d’un « Homme Idéal », où il sera question d’établir la vérité sur des faits troublants. De Hitchcock à Chabrol, on convoque astucieusement le doute autour d’une démarche, loin d’être originale, mais audacieuse dans son application. Penser au « Chant du Loup » rassure instinctivement, dans son atmosphère anxiogène et son thriller patriotique. Malheureusement, le film ne gagne pas assez de profondeur, comme son aîné et cherche donc à trainer un peu plus autour du cerveau de son héros plutôt que de ses oreilles, à ne pas confondre donc. La paranoïa guette ainsi toutes les failles d’hommes, soumis aux contraintes d’un système, où chaque maillon s’avère aussi remplaçable que défaillant.
Le réalisateur nous plonge alors dans l’univers du bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile, également BEA, où Mathieu (Pierre Niney) passe en revue toutes sortes de bandes sonores après les accidents. Son métier n’a donc qu’un seul objectif, isoler la vérité et étouffer le mensonge, chose qui lui entaillera quelques nerfs au passage. Ce sera donc au détour d’un crash majeur qu’il se projette dans le cockpit, par le biais de cette fameuse boîte noire que l’on étudie avec rigueur ou presque. Avec toute une mise en scène qui ajoute des dérivations à son mystérieux circuit, c’est parfois décevant de constater comment Gozlan hésite justement à déformer l’image. Il repose tout sur la performance du comédien, certes impliqué, mais peut-être trop détaché dans son obsession. Ce sera pourtant le développement majeur de l’intrigue, qui flirte méthodique avec le complot.
Il ne s’agit donc presque plus de connaître le véritable contenu des enregistrements audio ou des informations liées à un programme piégé ou obsolète. Le récit à manie de superposer les interrogations, même s’il laisse passer de bons gros morceaux pour que l’enquête gagne en crédibilité. Il n’empêche que les enjeux se renouvellent assez rapidement, jusqu’au point de non-retour, où le héros est victime de son propre orgueil et de son impatience. De même, le spectateur n’attend plus que le dénouement pour enfin soupirer de satisfaction. Le jeu de piste est donc logique et la compagne de Mathieu, Noémie (Lou de Laâge), y participe avec un malin plaisir d’accroître ce parasite, qui enveloppe chaque personnage dans le déni. La communication verbale ne signifie donc plus rien afin de justifier tant de décès et tant d’efforts dans l’élaboration d’un protocole, qui perd en lisibilité. C’est un souci récurrent qui confrontera minutie et spontanéité, une contradiction qui pèche sur le manque de point de vue.
Le parti-pris de s’abriter dans le scaphandre d’un seul personnage invite inévitablement la confusion à se manifester. Mais les quelques envolées de « Boîte Noire » ne captent la pertinence uniquement lorsqu’il révèle les limites des interactions professionnelles et privées. L’analyse va donc au-delà d’un accident technique, car l’humain sera toujours le dernier rempart et la première des raisons à ses traumatismes. Les idées sont bien présentes, mais elles s’éparpillent, dans l’hommage aux drames passés et dans ce que quatre scénaristes souhaitent apporter au fuselage d’un projet, qui manque parfois de stabilité et de cohérence.