Cassé par la critique et globalement boudé par le public, "Oblivion" ne restera pas dans l’Histoire du cinéma. Et j’avoue ne pas comprendre pourquoi le film à fait, à ce point, l’unanimité contre lui… surtout au vu du principal reproche formulé à son encontre, à savoir la vacuité du scénario qui ne raconterait pas grand-chose ! Car, selon moi, le scénario est, au contraire, l’une des forces de cet "Oblivion" puisqu’il ne craint pas de s’aventurer hors des sentiers battus en proposant une intrigue plutôt inattendue et terriblement évocatrice (la Terre devenue un champ de ruines inhabitable suite à un conflit avec des aliens dont on ne voit pas la moindre image, la menace extra-terrestre tapi dans l’ombre, les zones interdites, la colonie d’Humains créée sur Titan…). Le réalisateur Joseph Kosinski fait, ainsi, le choix d’en montrer le moins possible, ce qui contraint le spectateur à fabriquer ses propres images et, ainsi, à s’immerger totalement dans l’intrigue. Cette immersion est renforcée par l’évolution de l’intrigue qui s’avère riche en rebondissements
(l’identité des prétendus "Chacals" attaquant les drones, le cloisonnement de la terre en différentes zones, l’utilisation des clones, la découverte de la véritable nature de la mission du héros…)
, en questionnement existentiel
(doit-on se contenter d’une vie tranquille dictée par une autorité hiérarchique ou doit-on transgresser les interdits ? doit-on transcender sa condition ? doit-on avoir peur de l’inconnu ?...)
et en dilemmes moraux
(le personnage de Vika est terrible sur ce plan)
. Cette intrigue, déjà très intéressante sur la papier, est, de surcroît, transcendé par la mise en scène du réalisateur ou, plutôt, son incontestable talent (déjà vu dans "Tron : L’héritage") pour créer des ambiances malgré les fonds verts et les effets spéciaux (très réussis). Il s’appuie, une fois encore, sur une formidable BO en faisant appel aux services du groupe français M83 (à croire que Kosinski est très francophile puisqu’il avait confié la partition de "Tron : L’héritage" aux Daft Punk). La musique a un véritable rôle dans "Oblivion" puisqu’elle vient véritablement magnifier les scènes d’importance voir même à compenser leur faiblesse. Ainsi, le final, qui vient résoudre l’intrigue de manière un peu trop simpliste
(avec un adversaire un peu con-con sur ce coup là)
est magnifié par les envolées lyriques de la BO. On notera, d’ailleurs, quelques autres petites faiblesses, à commencer par des inspirations (pour ne pas dire des emprunts) parfois trop marqués à d’autres films (on pense à "2001 l’odyssée de l’espace", à "Matrix", à "Independance Day"…), quelques grosses ficelles scénaristiques
(la chute providentielle du vaisseau transportant le corps de Julia et son opportun sauvetage…)
ou encore des seconds rôles pas toujours très consistants (la superbe Olga Kurylenko en mystérieuse femme fantasmée, Morgan Freeman en grand gourou, Nikolaj Coster-Waldau en homme de main méfiant…). Question interprétation, on retiendra davantage les prestations de Andrea Riseborough en compagne ambiguë, de la trop rare Melissa Leo qui parvient à rendre détestable son personnage d’hologramme filmé en plan fixe et, bien évidemment, de la star Tom Cruise qui, même s’il n’est pas à l’affiche de films aussi fantastiques (et immanquables) que dans les années 80/90, demeure un fantastique acteur qui donne de sa personne sur les tournages. Au final, malgré sa désastreuse réputation, "Oblivion" est un film intéressant, bien réalisé et bien interprété… bref, un film réussi.