L’échec de Tlamess tient à son incapacité à lâcher prise pour se perdre en compagnie de ses personnages dans les égarements et les errances d’un langage en démolition et reconstruction. Car voilà un film qui ne parle pas beaucoup, réserve la parole tunisienne aux échanges conversationnels ou aux mots criés par les agents de l’ordre lors de la traque ; un film qui aimerait recomposer un langage corporel, intuitif, primitif. Or, pour orchestrer ce dépaysement, ce retour aux sources, le réalisateur fait le choix d’une série de plans esthétisés, tel un long clip fait de longs travellings, plans-séquences, paysages urbains captés par drones ; le résultat déroute, certes, mais avance à reculons, agace là où il aurait dû fasciner parce que jamais ne percent l’immédiat, l’urgence, l’instant. Tout semble balisé, à l’instar du sentier que suit le protagoniste principal après avoir échappé à la police, entièrement nu. Il y a quelque chose de trop pensé, de trop maîtrisé, de trop anticipé, si bien que les symboles s’accumulent et voient leur charge mystérieuse s’annuler – des rectangles, partout des rectangles – pour ne laisser au spectateur qu’un patchwork de saveurs, comme ces diffuseurs de parfums dont on imprègne la bandelette de carton jusqu’à ne plus rien sentir. Restent de beaux plans et quelques idées de mise en scène.