Petit à petit, alors qu’il a 60 ans depuis décembre dernier, le philippin Lav Diaz apparait pour ce qu’il est : un des plus grands réalisateurs de cinéma de notre époque, voire le plus grand. Il faut dire que s’il n’a pas encore la renommée qu’il mérite très largement, c’est un peu de sa faute : la longueur de ses films nuit gravement à leur distribution dans les salles. Une durée qui n’est pas vraiment rédhibitoire dans les festivals mais qui fait hésiter les distributeurs et les programmateurs. Pensez donc : en 2004, "Evolution of a Filipino Family", 10 h 43 ; en 2008, "Melancholia", 7 h 30 ; en 2014, "From What is before", Léopard d’Or du Festival de Locarno 2014, 5 h 38 ; en 2016, "Berceuse pour un sombre mystère", 8 h 05. A côté, "Norte, la fin de l’histoire", d’une durée de 4 h 10, distribué en France en 2015, "La femme qui est partie", Lion d’or à Venise en 2016, sorti en 2017 et qui ne dure que 3 h 46, "La saison du diable", film de 2018, 3 h 54, font presque figure de court-métrages ! Cette année, "Halte", le dernier film de Lav Diaz, faisait partie, à Cannes, de la sélection de La Quinzaine des Réalisateurs et un distributeur courageux a décidé de le sortir en salles. Espérons le même courage de la part de nombreux programmateurs. Espérons aussi que nombreux soient les spectateurs pour aller vérifier par eux-mêmes l’exceptionnelle qualité de ce réalisateur. Après tout, "Halte" ne dure que 4 h 39 et c'est peut-être, de tous ses films, celui qui est le plus accessible ! Passé, présent, futur : Lav Diaz continue de nous immerger dans son pays, les Philippines car, au travers d’une histoire se déroulant dans un futur proche, il nous parle en fait du présent des Philippines, un pays actuellement dirigé par le Président Rodrigo Duterte à côté duquel Trump arrive presque à faire figure d’homme politique sain d’esprit. Du grand cinéma pendant 4 heures 39 !