J'en gardais un souvenir très vague, voire légèrement mitigé. Vu trop jeune ? Possible. Toujours est-il que redécouvrir « Diamants sur canapé » au cinéma a été pour moi un délice quasiment du début à la fin. « Quasiment » parce que dans les premières minutes, j'ai eu un peu de mal. Souci de rythme, d'écriture... J'avais presque l'impression que Blake Edwards tâtonnait un peu, ne sachant exactement quel style, quel ton donner à l'œuvre. Heureusement, cette impression s'estompe très vite pour laisser place à une belle histoire, pourtant emprunte d'une profonde mélancolie. Il y a beau avoir de jolis moments, de grands sourires sur nos visages, la tristesse, la désillusion ne sont jamais loin, à l'image de personnages très souvent à contre-courant de ceux de l'époque : entre un héros « obligé » de se prostituer ou une mondaine souvent terriblement futile dans ses choix de vie, difficile de faire moins consensuel au pays de l'Oncle Sam... Pourtant, cela est fait (presque) sans jugements, sans condescendance, le réalisateur cherchant au contraire toujours ce qu'il y a derrière cette apparente superficialité : en l'occurrence beaucoup d'amertume, d'incapacités à affronter le « monde réel », thématique on ne peut plus moderne, probablement encore plus qu'à l'époque. D'autant que si Edwards est surtout connu pour son goût des comédies délirantes (et pas toujours très légères, osons l'écrire), il fait ici preuve d'une élégance, d'une délicatesse démontrant un talent quasi-égal aux plus grands noms d'Hollywood. Alors tout n'est pas parfait : cette caricature de japonais par Mickey Rooney n'est pas loin du scandale et vraiment pas drôle, les seconds rôles manquent souvent de personnalité (à l'exception de Patricia Neal et Martin Balsam, ce qui est déjà pas mal!) et de présence à l'écran, le cinéaste ayant manifestement fait le choix de se concentrer sur son duo vedette. Mais comment lui en vouloir... Si George Peppard livre une prestation honorable, il lui est évidemment impossible de faire de l'ombre à Audrey Hepburn, que le réalisateur met magnifiquement en valeur à travers de merveilleuses tenues signées Givenchy. Cette actrice ne connaît pas la vulgarité, parvient à rendre irrésistible une héroïne on ne peut plus frivole, l'écriture infiniment délicate de ses dialogues et des situations n'y étant pas non plus étrangères : quelle charme, quelle grâce, quel sourire... Sans être mon rôle préféré de cette dernière, qu'il soit devenu son plus emblématique n'a rien d'étonnant : il suffit de la voir
chanter « Moon River » ou négocier un achat abordable chez Tiffany's
(deux scènes absolument merveilleuses, en passant) pour comprendre l'aura que peut encore avoir l'actrice aujourd'hui. Malgré quelques baisses de rythme
(les passages autour du parrain de la Mafia m'ont peu emballées)
, difficile de ne pas saluer l'audace et le plaisir ressenti devant cette œuvre vraiment pas comme les autres (jusqu'à son dénouement, aussi bien dans le renoncement « amoureux » forcé d'Holly que ce merveilleux baiser sous la pluie, chat en main) : un classique à part, intemporel.