Monia Chokri est une actrice québécoise reconnue, notamment pour être une fidèle du jeune prodige Xavier Dolan. Elle passe pour la première fois derrière la caméra et nous livre son premier film, « La femme de mon frère ». On retrouve d’ailleurs sur pas mal d’aspects des réminiscences de l’œuvre de son compatriote canadien. Par exemple, dans cette tonalité un peu iconoclaste et/ou poétique qui enrobe tout le long-métrage ou dans la manière dont la jeune cinéaste appréhende les rapports humains, familiaux et amoureux notamment. Sur la forme également, il y a des similitudes. Mais elle n’est pas dans le plagiat ni la pâle copie et elle parvient parfaitement à créer un univers qui lui est propre, une voie plus féminine, moins queer, un peu le pendant québécois d’une Greta Gerwig américaine (qui joue dans « Frances Ha » ou qui a réalisé « Lady Bird »).
La voie qu’emprunte Chokri est celle, souvent en partie autobiographique, de la chronique féminine d’une trentenaire paumée. Le titre est un peu trompeur car le film ne se focalise aucunement sur une relation triangulaire entre une sœur, un frère et la compagne de ce dernier. C’est juste l’une des constituantes principales du scénario mais pas son unique fil directeur. En effet, « La femme de mon frère » pourrait être qualifiée de comédie dramatique mais une comédie dramatique centrée avant tout sur le portrait d’une jeune femme de notre époque, oscillant entre gravité (un peu) et légèreté et humour (beaucoup). A ce titre, le long-métrage est souvent assez caustique avec de bonnes réparties et pas mal de situations plutôt drôles. Néanmoins, l’humour ne fonctionne pas à tous les coups. Et si le film est très bavard, c’est néanmoins souvent bien écrit, particulièrement dans des seconds rôles croquignolets.
On sera un peu plus réservé sur la mise en scène, qui n’est pas proprement renversante ni innovante - elle apparaît même parfois un peu vieillotte - mais qui laisse parfois échapper un certain cachet suranné qui fait tout son charme. Le problème principal de ce premier essai est en revanche sa durée. « La femme de mon frère » est en effet bien trop long. Ces longueurs tout autant que certaines scènes qui s’étirent, comme l’interminable plan final, nuisent clairement au plaisir que l’on prend à découvrir ce film. Raccourci de vingt bonnes minutes, on aurait évité l’ennui pointant parfois et le résultat aurait été bien plus pertinent. Mais c’est souvent le propre des premières œuvres d’être trop généreuses et d’avoir ce type de défauts. En revanche, s’il faut souligner quelque chose c’est bien l’osmose qu’il y a entre la comédienne principale (impeccable Anne-Elisabeth Bossé) et Patrick Hivon. Tous deux jouent une sœur et un frère dont la relation à l’écran est retranscrite de la manière la plus sincère, naturelle et réaliste qui soit. La complicité créée entre les deux personnages (et les deux acteurs) est criante de vérité. C’est l’atout principal de ce long-métrage à la fois charmant, délicat, gentiment impertinent mais parfois un peu excessif.
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