Laurent Cantet semble continuer à explorer les rebellions juvéniles, la tentation du racisme dans l'Atelier, le féminisme radical dans Foxfire et là l'expression de sa révolte au travers de tweets pamphlétaires pas très Charlie. Alors c'est peut-être le film que j'ai le moins aimé dans ceux que j'ai cités, mais j'apprécie le traitement du personnage principal. Disons que je comprends qu'à 16 ans (et même après) on publie des conneries sur internet, des trucs qui ne sont pas censés être gardés, être ressortis, montrés au grand jour et qui vont servir à mettre sur la touche celui qui les a proférées.
Parce que c'est ça l'histoire du film, un banlieusard qui arrive à franchir le périph', à être adoubé par une certaine bourgeoisie intellectuelle et qui est subitement rattrapé par des tweets qu'il publiait sous le nom d'Arthur Rambo. C'est inspiré de l'histoire vraie d'un type que je ne connais pas, mais je me souviens d'autres cas similaires, notamment une fille voilée qui voulait faire The Voice et dont on avait exhumé des tweets...
Alors moi j'suis un peu con, mais une bonne partie des tweets attribués à ce Arthur Rambo me font bien rire et je comprends tout à fait que ça puisse faire marrer de publier ça sous pseudo sans voir nécessairement le mal. Mais il n'en faut pas plus pour que le mec soit lâché de partout et notamment par la bourgeoisie qui l'adulait quelques instants auparavant. Tout le petit cirque mondain peut s'effondrer très vite.
J'aime le double reproche qui lui est fait : celui de ne pas être totalement lisse et plus tard dans le film, par le biais du petit frère du héros, celui de justement vouloir se lisser, de vouloir finalement quelque part se conformer à ce que la bourgeoisie attend de lui... Les conneries qu'il publiait avaient un écho dans une certaine jeunesse désœuvrée et ces paroles d'ado révolté avaient des conséquences.
Mon souci avec le film c'est qu'il est trop didactique, en fait c'est intéressant pour ce que ça raconte, mais c'est raconté de manière bien trop scolaire... Je trouvais, notamment dans Foxfire, que Cantet arrivait à capter des instants de vie, à les rendre beaux, poétiques, justes... Mais là je ne vois que le scénario, il faut raconter une histoire, la raconter sans s'autoriser un petit détour qui donnerait un peu de consistance à ces personnages, à ce héros...
Je reprocherais aussi au héros d'être finalement trop lisse, ça aurait été bien plus ambigüe s'il avait pensé un peu ces tweets, si on sentait qu'il y croyait un peu à tout ça, que c'est pas vraiment au fond de lui le gendre idéal.