Ce film est comme l'Homme, qui devient plus mûr, plus subtil, plus savant à mesure qu’il s’approche de sa fin.
Car pour ce qui est du commencement, c'est un réel enfantillage. Hugh Jackman et Rebecca Ferguson dont on connaît pourtant de bonnes prestations semblent bouder certaines scènes, les jouer de mauvaise foi, horriblement. C'est comme s'ils n'achetaient eux-même pas la partie romantique du film, expressions ahuries, crispations du visages.. Egalement, le montage contribue fatalement à faire paraître le film plus mauvais qu'il ne l'est, la surenchère des coupes, surtout pendant ces très peu convaincantes scènes de séduction rend toute bonne volonté de rentrer dans le récit improbable, le spectateur est forcé de voir qu'il y a derrière l'image une équipe d'hommes et de femmes cinéastes qui s'efforcent de faire rentrer un cahier des charges dans le film qu'ils veulent produire.
Lorsque ce film "mûrit" donc, il commence à nous parler de scènes de SF innovantes, et enfin, car jusqu'ici on se heurte systématiquement dans une pièce dont les quatre murs sont Total Recall, The Eternal Sunshine of the Spotless Mind, Memento, et peut-être Minority Report. Cette SF enfin innovante, on la trouve -- et je pense que la plupart le reconnaîtront, dans cette scène où Mae s'adresse à son amant par l'intermédiaire du personnage de Cyrus en anticipant que son amant traquera Cyrus et inspectera ses souvenirs. Cela fait d'ailleurs penser à la scène assez fascinante de Interstellar (les frères Nolan s'échangent-ils des idées ? Car Jonhatan Nolan est au scénario de Reminiscence), où l'acteur communique avec sa fille depuis le futur en faisant tomber des livres d'une armoire depuis une autre dimension lointaine.
Il y a dans les tout derniers instants de ce film les véritables trouvailles, de la Poésie presque. Je pense au savant emploi du mythe d'Orphée et Eurydice. En effet, les protagonistes jugent bon de raconter l'histoire jusqu'à sa moitié, quand Orphée obtient d'un ange de tirer Eurydice de la mort, et la ramener des enfers. C'est une très belle manière de parler du thème de la revisite du souvenir, quelle histoire voulons-nous nous raconter, quels choix faisons-nous par rapport au récit, où et quand l'arrêtons-nous.
"Ce n'est pas le passé qui nous hante, c'est nous qui hantons le passé" (dixit la voix off), c'est nous qui prenons des décisions concernant le passé et non l'inverse. C'est ce qui est finalement proposé dans ce film est c'est une assez belle réussite.
Espérons que la nouvelle réalisatrice Lisa Joy, à l'image de son film, prenne davantage de saveur avec le temps, libère ses films de quelques excédents de style, et de quelques pages de scénarios surtout. Il y a dans l'idée de ce long-métrage quelque chose d'assez sophistiqué, mais beaucoup trop a été filmé en dehors de ce bourgeon.