Alors, oui, c'est gros. C'est un B énormissime et fauché, qui flirte allégrement avec le Z. N’ayons pas peur des mots. C'est du grand n'importe quoi stratosphérique et régressif. Pour apprécier, faut débranché la partie adulte et logique de son cerveau, et rallumer celle de la fin du collège. Une histoire popcorn, fantasmé, intimiste et symbolique, digne d'un segment de Metal Hurlant, hybridé avec un épisode de Histoires Fantastiques. Bref, c'est débile. Rien n'a l'air réaliste. Mais est-ce que ça en fait un divertissement désagréable pour autant ?... Certainement pas. Au contraire. C'est même plutôt bien bon, intrigant, prenant, haletant, jouissif et rigolo. Pas dénué de sensibilité, d'imagination et de subtilité. L'ambiance est inventive et juste parfaite. La structure narrative exponentielle est savamment bien foutu. Et les rebondissements grotesque en cascade à la Shane Black, rythme parfaitement une histoire théâtrale qui aurait pu être bien plus plate, calmement enfermé plus de la moitié du temps dans un huis clos solitaire et minimaliste, et qui tient au final sur un timbre poste d'une heure et quart, égayé seulement par un dernier tiers en feu d'artifice d’excès en tout genre. Malgré un budget visiblement au raz des pâquerettes, la mise en scène épatante est joliment agréable et picturale, millimétré au poil de mogwaï prêt, ménageant sa monture narrative avec une maitrise évidente, vers les sommets d'un délire ouvertement outrancier, et qui n'a absolument peur de rien, même pas du ridicule, quitte à nous surprendre de manière aussi improbable que délicieuse. C'est tellement n'importe quoi, qu'au bout d'un moment, on se demande avec amusement ce qu'ils vont nous pondre comme idée saugrenu et barjo. Tout peut arriver. Et ça, c'est vraiment pas désagréable. Coté casting, grâce à une prodigieuse et intelligente mise en scène, qui fait entièrement voir cette histoire à travers les yeux, les oreilles et l'esprit de son héroïne, Chloé Moretz porte littéralement à elle seule le film sur ses épaules avec charisme, et le talentueux jeu de micro mimique charmante qu'on lui connait, jusqu'à rendre son personnage véritablement iconique, quelque soit le niveau de grotesque de la séquence. Et pourtant, croyait moi qu'il y a un sacré level de nawak. La musique anachronique, et en décalage stylistique, est juste géniale et parfaitement découpé, et ajusté en symbiose avec le montage image. La bestiole full CGI n'est pas si mal faite que ça, mal une qualité évidente de tout petit téléfilm Netflix. Et cerise sur le gâteau, le pastiche de ces vieux cartoon institutionnels Private SNAFU, dédié à la pédagogie des troufions américains d'antan, j'ai trouvé ça d'un délicieux raffinement. Bref, Shadow In The Cloud ne finira pas aux Oscars. Plutôt aux Razzy catégorie WTF. Ou dans le cœur attendri et sincère, de certain fan de nanarland. Mais j'ai pourtant bien apprécié. C'est même plutôt le genre de débilité que j'apprécie beaucoup, en fait. Surtout quand il y a autant de talent dans la mise en scène, pour jongler avec un micro budget, des intrigues bête à bouffer du foin et du pur fantasme cinématographique. Deux petits conseils. Si d'habitude, vous n'aimez pas particulièrement les prestations de Chloé Moretz, évitez carrément ce film, qui vous agacera forcément au plus haut point, vu qu'il n'y a qu'elle à l'image 80% du temps. Sinon, pour les autres, laissez le charmant agir. Et si vous n'avez encore pas vu le trailer, ne le regardez pas. La surprise n'en sera que plus grande, et le choc plus délectable.