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Antonio Peress
8 abonnés
337 critiques
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4,0
Publiée le 18 juin 2022
Un excellent documentaire, rendu justice à cette juste cause si peu défendu. Mêlant avis engagé et vision neutre, il est plaisant de pouvoir se plonger entièrement dans cette recherche de la vérité. Ainsi que dans les méandres de la sournoiserie qu'elle côtoie, et des dilemmes internes qu'elle propage. Bref, de quoi passer un super moment, drôle, instructif et surtout éclairant de nouvelle voie.
Ce documentaire, disponible sur Netflix depuis un an, est intemporel : il traite des « platistes » (les personnes qui pensent que la terre est plate) mais, par construction mentale, on nous montre qu’il traite aussi des anti-vaccins, des climatosceptiques, des créationnistes et des complotistes de tout bord sur les attentats ou tout autre sujet. Il donne la parole de manière égale aux deux clans et laisse à chacun le soin de se faire sa propre idée. Il oppose bien les deux approches intellectuelles : la démarche scientifique et l’autre dont le résultat est admis d’avance et qui écarte tout fait ou résultat d’expérience, à posteriori, qui ne permettrait pas d’arriver à ce qui est souhaité, que l’expérience soit réalisée par autrui ou par soi-même. Mais surtout, et pour moi c’est le plus important, il y a l’opposition entre le syndrome de l’imposteur, une sorte de doute et d’humilité des plus compétents dans un domaine, et l’effet Dunning-Kruger, amplifié par les informations disponibles sur Internet : une personne n’ayant pas de compétence sur un sujet à tendance à se surestimer. Ce biais cognitif ne touche pas uniformément toutes les cultures : ainsi les nord-américains sont beaucoup plus concernés que les japonais. A méditer, par ceux qui le peuvent, en ces temps de pandémie…
Très bon documentaire sur les platistes, j’étais sceptique au début quant à la qualité de ce documentaire mais j’ai été positivement surprise. J’ai pus voir comment ils pensaient et leurs avis sur ceux qui n’y croient pas. J’ai trouvé ça enrichissant !
Le monde se divise en deux catégories, d’un côté, ceux pour qui la Terre est ronde et de l’autre, ceux qui affirment qu’elle est plate. On appelle d’ailleurs ces derniers des « platistes » ("flat-earther" en VO) et ils sont de plus en plus nombreux dans le monde à suivre cette croyance…
Aux États-Unis, ils sont environs 16% à y croire, Daniel J. Clark est allé à leur rencontre, pour savoir qui se cache derrière cette mouvance. A cette occasion, on y fait la rencontre de divers théoriciens ou complotiste (youtubeurs & podcasteurs) tels que Mark Sargent (principal théoricien et auto-proclamé "King of the Flat Earth"), Patricia Steere (youtubeuse sur la chaîne "Flat Earth & Other Hot Potatoes"), Bob Knodel (youtubeur sur la chaîne "Globebusters") ou encore Chris Pontius (un artisan qui fabrique non pas des globes terrestres mais des flat earth).
Le film donne la part belle à Mark Sargent, ce dernier étant persuadé que l’on vit dans un gigantesque studio hollywoodien à la façon de The Truman Show (1998), que non seulement la Terre est plate mais qu’elle est aussi recouverte d’un immense dôme. D’autres platistes viennent prendre la parole et invitent la caméra chez eux, on en profite pour se rendre compte à quel point ils sont obnubilés par leurs croyances (ils collectionnent tous les objets en lien avec leur théorie fumeuse, ils vont jusqu’à l’indiquer que leurs plaques d’immatriculation (« ITSFLAT » ou encore « NASALIES » pour affirmer haut et fort que la Nasa nous ment) ou l’affiche directement sur leurs vêtements, montres, mobiliers, ...).
Le film dévoile aussi les dissensions entre platistes, notamment la guéguerre qui oppose Mark Sargent & un autre théoricien : Math Powerland (ce dernier l’accuse d’être à la solde de la CIA). On apprend aussi que 70% des platistes pensent que la Terre est recouverte d'un dôme, tandis que les 30% restant imaginent le ciel à l’infini.
Pour contrebalancer les propos des platistes, le réalisateur donne aussi la parole à divers spécialistes (astrophysicien, professeur, physicien, écrivain scientifique, …). Enfin, le film suit les platistes jusqu’au lancement de leur toute première "Flat Earth International Conference" (en 2017).
La Terre à plat (2018) ne cherche pas à contredire leurs propos ni à se moquer d’eux, mais on comprend rapidement que cette paranoïa qui les anime ne fait que renforcer leur détermination à faire éclater au grand jour le complot mondial auquel nous serions confrontés depuis des siècles. On y croise une bande de doux dingues (moins tarés que ceux qui affirment que les attentats du 11/09 sont une machination), à la fois sympathiques & amusants.
Étonnamment, Netflix ne m'a recommandé ce documentaire qu'à 57%. Autant dire que pour leurs algorithmes, je n'étais pas du tout dans la cible. Peut-être parce que je ne suis ni platiste ni conspirationniste ? Ou peut-être simplement parce que le thème du documentaire n'est pas celui affiché. Il s'agit davantage d'un reportage sociologique sur l'impact de la modernité et des réseaux sociaux qui donnent la possibilité à des personnes isolées de se rassembler et de créer une caisse de résonance qui finit par s'auto-alimenter. On voit d'ailleurs, à la fin du reportage, qu'aucun d'entre eux n'a envie de savoir si la terre est effectivement plate, ou pas. Ce qui est important pour eux est de se retrouver dans une communauté composée de personnes qui partagent les mêmes valeurs, qui connaissent les mêmes difficultés sociales et économiques, et qui ressentent la même forme d'isolement qu'eux. Il est fait mention de l'effet Dunning-Kruger, qui résume bien la situation : il ne s'agit pas d'experts (même pas un seul de près ou de loin) et ont tous en commun une absence totale de compétence sur le sujet - pourtant ils veulent être importants, considérés et écoutés. Il s'agit avant tout d'une croyance, d'une conviction qui n'est qu'un prétexte pour trouver des gens qui leur ressemble et les comprenne. Cette communauté pourrait tout aussi bien être religieuse, constituée de gilets jaunes ou d'anti-vaccins. Bref, c'est un reportage passionnant qui en dit bien plus qu'il n'y parait, et l'absence de voix off en dit long sur la liberté d'interprétation voulu par les réalisateurs. Ces gens sont attachants et à aucun moment on a envie de se moquer d'eux. Après tout, ils ne font de mal à personne.