France est sûrement un des films le plus abordable de Bruno Dumont : un scénario lisible, des péripéties, un propos caustique, des situations frappantes.
Il s'agit presque d'un film "normal". Presque, parce qu'il a tout de même une particularité notable, celle d'assembler plusieurs styles dans un ensemble bizarrement composite, ce qui explique probablement le mauvais accueil critique que le film a généré, beaucoup s'attendant à une ligne claire, que le film ne tient pas de façon continue.
France démarre par comme une satire au vitriol d'un certain style de journalisme, parodié de façon outrancière, notamment par le personnage d'assistante too much jouée par une Blanche Gardin en pleine forme. Il peut même virer au burlesque surréaliste (la scène de conférence de presse avec Emmanuel Macron, la rencontre chantée dans la neige, le capitaliste qui annonce tranquillement qu'il s'agit de devenir pauvre).
En cours de route, Dumont fait bifurquer son film vers un autre point de vue : la journaliste haïssable est elle-même sujette à état d'âmes, et passera du côté des victimes suite à une machination, avant une scène de quasi-rédemption sur les terres du cinéaste, dans le Boulonnais. Déroutant pour ceux qui s'attendaient à un dégommage au bazooka sur la durée...
Comme si cela ne suffisait pas, France est aussi un exercice de style formel (la magnifique scène de l'accident, absolument étonnante dans le cinéma de Dumont, les regards caméra) et une friandise baroque en terme de direction artistique (l'intérieur de l'appartement, la garde robe de la journaliste, les superbes extérieurs).
Difficile donc de s'y retrouver, sauf à considérer, comme moi, que la dernière oeuvre du nordiste est avant tout un beau et sensible portrait de femme, saisie dans ses contradictions, et magnifiquement jouée par une Léa Seydoux parfois très enlaidie, dont le jeu distancié fait ici merveille. Je pense qu'il s'agit ici de son meilleur rôle.