Slalom
Triple domination
C’est le 1er long métrage de Charlène Favier qui sort sur les écrans… avec les difficultés que l’on sait, il était programmé la semaine où le confinement épisode 2 a débuté. Heureusement pour nous voici enfin ces 92 minutes qu’on airait regretté ne pas découvrir. Lyz, 15 ans, vient d'intégrer une prestigieuse section ski-études du lycée de Bourg-Saint-Maurice. Fred, ex-champion et désormais entraîneur, décide de tout miser sur sa nouvelle recrue. Galvanisée par son soutien, Lyz s'investit à corps perdu, physiquement et émotionnellement. Elle enchaîne les succès mais bascule rapidement sous l'emprise absolue de Fred... Voilà un modèle de film trouble, à l’ambiance malsaine mais où le manichéisme que l’on pouvait craindre, est parfaitement contourné, tant les personnages sont complexes. A ce propos, la bande-annonce est extrêmement trompeuse… regrettable ou pas ? A vous de juger. Ce film a été sélectionné dans 4 grands festivals, dont Cannes 2020, et ce n’est pas par hasard.
A une époque où les langues se délient enfin et révèlent des affaires de violences sexuelles à l'encontre de mineur(e)s dans le monde du sport - judo, patinage, tennis… -, Charlène Favier, qui a été elle-même une victime durant son adolescence était fort bien placée pour évoquer les tourments d'une très jeune fille qui subit emprise psychologique et agressions, tout en posant une question cruciale : est-elle totalement une victime ? L’ambivalence est omniprésente. Habile et surprenant, ce film nous fait pénétrer jusqu’au plus intime la psychologie de personnages souvent ambigus. Le malaise s’insinue dans l’esprit du spectateur et n’en finit pas de le bouleverser bien après le mot FIN. Le plus intéressant ici, c’est la manière d’aborder le phénomène d’emprise psychologique, qu’un coach sportif adulte peut imposer à une jeune athlète vulnérable. Tout est ici, insidieux, subtil. Le glissement vers la peur de cette championne en herbe, une guerrière avançant les poings serrés, avec une extraordinaire énergie de survie comme bouclier, habilement décrit. Peut-être pas le film dossier à charge que certains auraient aimé voir, mais un quasi huis-clos, étouffant dans l’enfer des sections sport/étude de haut niveau. Dérangeant mais nécessaire.
Depuis 2017 et son 1er film Ava, Noée Abita n’en finit plus de crever l’écran. C’est encore le cas dans ce drame intimiste où elle ne quitte pas l’image une seule seconde. Elle nous fait partager, à travers son regard incandescent, les troubles, les joies, les craintes et les souffrances d’une jeune fille qui plus est athlète de haut niveau. Les scènes de compétitions de ski, qu’elle a assurées elle-même sont admirablement filmées. – Une excellente bande-son à souligner -. Face à elle, le toujours excellent et juste Jérémie Renier, qui, bien que belge, reste un de nos comédiens les plus fins. Citons encore les très bonnes prestations de Marie Denarnaud et Muriel Combaud. A ne pas manquer !