Bon, Pink Flamingos c’est indéniablement le type de films difficile à critiquer, car appartenant à la vague de films underground des années 70, nettement plus expérimentaux qu’autre chose. Pour autant je vais essayer de m’y atteler.
D’abord, je souligne un casting convaincant. Divine, dans son propre rôle, n’a évidemment pas à faire un énorme effort de composition (bien que le travestissement en lui-même soit déjà une performance exemplaire ici), mais donne à son personnage toute l’exubérance, la folie, la luxure nécessaire. Excessif à souhait, il (elle ?) apporte un net plus au métrage. A ses cotés une pléiade d’habitués du cinéma de Waters. Dans l’ensemble ils ont des rôles trashs, pas si facile que cela à incarner avec naturel, et ils le font sans grande difficulté ici. Du coup l’ensemble n’a pas un caractère artificiel, comme c’est souvent le cas dans ce type de film, et on a vraiment le sentiment d’être confronté à un monde de dégénérés, mais pas si farfelu que cela !
Le scénario tient évidemment en peu de choses, et est surtout prétexte à un déchainement de folie en tout genre. Dans l’ensemble le film est plutôt dynamique, bien rythmé, et offre quand même une trame de fond qui permet de ne pas simplement assister à une « expérience », comme c’est trop souvent le cas dans ces « OFNI » que nous offre de temps en temps le cinéma. La conclusion est d’ailleurs bien trouvée, et laisse une forte impression. Pour ma part j’ai suivi avec un certain intérêt Pink Flamingos, mais il est clair qu’il s’inscrit de très forte manière dans les années 70, et qu’aujourd’hui une large part de son propos est un peu désuète. D’autres films de la période ont moins vieilli de ce point de vue.
Visuellement avec un budget ric-rac de 10000 dollars, il ne faut pas s’attendre à des miracles. Les décors notamment se limitent à trois lieux, dont un intérieur miteux, une boutique et une caravane (je crois que c’est à peu près tout). La photographie fait franchement très amateur, mais à la limite cela lui convient plutôt bien aujourd’hui. Ca renforce nettement son coté underground, et ca lui donne une esthétique particulière qui plaide plus en sa faveur qu’en sa défaveur. Quant à la mise en scène de Waters, elle est dans la même veine. Aucun plan n’est stable, les cadrages sont très moyens, certains effets de mise en scène sont ratés (lorsque Divine tire sur la fin). Bon après il est certain qu’il vaut mieux aussi cette dimension amateure dans la mise en scène, car sinon la différence entre cette-dernière et les décors et la photographie aurait vraiment fait tache. Alors Pink Flamingos est clairement un film que je ne conseille qu’aux amateurs du genre. Ca n’a rien d’horrifique, mais c’est surtout trash. Tous les bas instincts humains sont représentés à l’écran sans détour, il y a du sexe bien crade, et un humour poisseux. Pour ma part je ne juge pas, mais il est évident que le public d’un tel film ne peut-être que très très restreint. Bonne bande son à relever aussi, variée et bien dans le ton seventies du métrage.
En conclusion, Pink Flamingos est un film singulier, qui ne laissera personne indifférent. Après tout c’est déjà pas mal, mais il faut reconnaitre que Waters parvient à éviter la plupart des écueils de ce type de films, ne se limitant ni à la dimension expérimentale, ni à la dimension purement trash. En clair, il n’est pas complètement abscons ou idiot. S’il est destiné à un public très averti, il offre 1 heure 30 bizarre et intrigante, alors ma foi, pourquoi pas jeter un coup d’œil en connaissance de cause.