Après avoir confessé une infidélité, une quadra quitte le domicile conjugal pour aller se réfugier dans l’hôtel d’en face...où elle rencontre une version plus jeune de son époux, ainsi que l’amour de jeunesse de ce dernier. Sont-ils réels ? Ou sont-ils des projections mentales d’une femme à la croisée des chemins, qui a un besoin urgent de faire le point ? En tout cas, le dispositif de cette auto-psychanalyse est strictement théâtral et Christophe Honoré, fidèle à ses habitudes, signe avant tout un film de dialogues, même si on ira de surprises en (bonnes) surprises au fil d’un scénario qui ne s’interdit aucune fantaisie dans son observation des mystères et des paradoxes du sentiment amoureux. Du reste, le film ne manque jamais d’humour, rien qu’à faire cohabiter des acteurs au tempérament aussi différents que Biolay et Lacoste, ou Mastroianni et Cottin. Vu à quel degré le temps et l’espace s’entrechoquent dans ce vaudeville onirique, ‘Chambre 212’ laisse évidemment une impression de légèreté et de désinvolture. Néanmoins, lorsque certains personnages confessent ce qu’ils ont sur le coeur, ce sont des regrets et de la mélancolie qui ressortent. Le cinéaste parvient, sans jamais perdre de vue l’aspect comique de ces souvenirs et de ces possibilités incarnées, à porter sur les relations sentimentales un regard bienveillant mais dépouillé des clichés rassurants du mélo. ‘Chambre 212’ est typiquement de ces films qui, s’ils sont visibles de la masse (et rien n’est moins sûr) contribueront à maintenir vivante l’aura de Paris en tant que capitale de l’amour, et il est même l’un de ceux qui, ces derniers temps, en parle le mieux, dans la version tordue, paradoxale et insaisissable de ce concept. Pourtant, montrez-le à un spectateur américain et il n’y comprendra rien. Il refusera même sans doute de valider l’idée que le mensonge peut servir de ciment à un couple, ou que ce dernier ne constitue pas une fin en soi, et retournera se rassurer en regardant ‘Emily in Paris’.