D’apparence on ne peut plus classique, ce film raconte le passage de l’enfance à l’adolescence de Mylia (Emilie Bierre, une révélation), une jeune fille de caractère plutôt réservé habitant la campagne québécoise pour qui est venu le temps de quitter l’école primaire et d’entrer au collège. Des films de cette sorte, on en a déjà vus plus d’un, c’est certain. Pourtant, si l’on y prend garde, on ne pourra qu’être séduit par le point de vue, malgré tout assez singulier, adopté par la réalisatrice, ne serait-ce que du fait du cadre dans lequel vivent les protagonistes.
La spécificité du film apparaît subtilement, par petites touches qui peuvent sembler anodines mais qui sont, en vérité, très signifiantes. Dès la première scène, intervient un évènement presque banal et cependant chargé de sens : Camille (Irlande Côté), la petite sœur de Mylia, a trouvé, dans le poulailler, une poule morte pour avoir été le souffre-douleur de tous les autres volatiles. C’est une manière d’introduire à la cruauté du monde, un monde dans lequel les faibles sont les victimes des forts, un monde dans lequel il s’agit cependant de trouver sa place.
Cette thématique est déclinée tout au long du film, non pas seulement du côté des animaux, mais de celui des humains. En effet, parmi les élèves du collège, se trouve un jeune amérindien prénommé Jimmy, venu d’une réserve voisine. Il se trouve, par ailleurs, que ce sujet, celui de la colonisation et de ceux qui ont été les victimes, est traité en classe par la professeure d’histoire. Malgré sa timidité, Mylia noue une amitié avec Jimmy, amitié qui, au fil du temps, révèle sa vraie nature amoureuse. Au contact du garçon, l’adolescente se découvre elle-même tout en s’initiant à des réalités de son pays. Ses yeux se décillent, sa sensualité s’éveille, mais aussi ses craintes. Mais ce qu’elle apprend de plus important avec Jimmy, me semble-t-il, c’est qu’il ne faut pas avoir peur de déborder du cadre, comme quand on colorie un livre d’images sans se soucier de mettre des couleurs hors de ce qui est prévu. Il faut tracer sa voie, sans nécessairement imiter des modèles. Ce n’est pas si banal, que d’apprendre ça.