Le réalisateur a été choqué de découvrir que les habitants de Toritama étaient satisfaits de leurs conditions de travail. Aucun d’entre eux ne se considérait comme une victime et il a fallu respecter cela dans la construction du film : « Il aurait été probablement plus facile de faire un film qui les remettrait à la place de victime, mais la réalité s’est avérée beaucoup plus complexe. Je m’attends à ce que le fait d’être confronté à une situation aussi radicale que celle de Toritama puisse déclencher chez les spectateurs une réflexion sur leur propre relation au travail et à la consommation ». À ses yeux, nous vivrons bientôt tous dans un gigantesque Toritama, où « même si nous sommes apparemment libres et capables d’utiliser notre temps comme bon nous semble, nous serons induits à une sorte d’esclavage de soi ».
Il a fallu cinq mois au réalisateur et à la monteuse Karen Harley pour achever le montage d’En attendant le carnaval. « Nous avions dix films possibles dans nos rushs et il était difficile de laisser de côté les neuf autres pour que cette histoire jaillisse », explique Marcelo Gomes. Ils ont eu plusieurs défis à relever : équilibrer les images du travail sans diluer leur force et humaniser l’histoire grâce notamment à la narration, qui fait appel à la mémoire de Gomes. « J’avais envie de jouer dans le film, pour toutes les relations que j’avais avec la région. Mais je ne savais pas exactement comment. Dans la salle de montage, nous avons découvert que le meilleur moyen serait de raconter les expériences émotionnelles que j’ai vécues dans ce lieu ».
Les séquences du carnaval ont été filmées par les protagonistes eux-mêmes. Il s’agissait pour le réalisateur et son équipe de ne pas gâcher le moment de fête et de joie qu’il représente. « Le travail leur accapare déjà toute la vie dans l’absolu. Pendant leur seul moment de transgression de cette logique, notre présence pouvait ruiner exactement ce que nous voulions montrer ». Au cours de ce dispositif, c’est le personnage de Leo qui s’est distingué : « C’est un philosophe né qui synthétise très bien les pensées de plusieurs de nos personnages. Comme les images qu’il a produites au carnaval ne différaient pas beaucoup des autres, nous avons décidé de nous en tenir à son expérience ».