Petits pays.... qui formaient ce que dans les atlas de mon enfance on nommait l'Urundi, mais grands massacres. Un des épisodes les plus atroces et les plus incompréhensibles de notre temps, dans lequel le "colonisateur", hélas, loin de jouer un rôle pacificateur entre les ethnies, en montant, comme d'habitude, l'une contre l'autre pour affermir son pouvoir, a exacerbé leur hostilité...
Comment un enfant peut il comprendre ce qui oppose des gens qu'il côtoie et dont il ne voit pas bien les différences? Ne sont ils pas les uns et les autres bons chrétiens? (!!!) Son père ne peut répondre que par une pirouette: les Hutus sont petits avec un gros nez, et les Tutsis grands avec un nez fin... n'est ce pas ce que nous même ressentions en regardant, navrés, les actualités? Bien sûr, il y a y tout un tissu de rivalités ancestrales que seuls les spécialistes peuvent bien appréhender. Le fait est que, dans la "bande" de Gabriel, il n'y a que des Tutsis -ou des métis de Tutsis.
Gabriel, métis franco-rwandais (Djibril Vancoppenolle), grandit à Bujumbura avec sa petite soeur Ana (Dayla De Medina). Il fait bien sûr des tas de bêtises avec les garnements de son âge. Dans cet heureux pays, les enfants courent partout en liberté; ils se baignent dans un grand lac; leur institutrice doit souvent sévir, mais avant tout elle les materne. Le bonheur quoi... Ce bonheur se fissure parce que leurs parents se séparent. En fait c'est leur mère, la belle Yvonne (Isabelle Kabano), qui s'en va. Elle a épousé un expat, entrepreneur en travaux publics, en rêvant d'une vie parisienne; mais Michel (Jean-Paul Rouve) est devenu plus africain qu'un africain... Yvonne fait partie de ces tutsis rwandais expatriés au Burundi dont les familles aimeraient revenir au pays, mais les Hutus alors au pouvoir n'en veulent pas: ce sont des communistes.... (ça marche toujours).
La suite, on la connait, mais la voir racontée par les yeux d'un enfant qui ressent, enregistre sans bien comprendre, et continue à vivre sa vie d'enfant, est une très belle idée. Elle nous éloigne d'un cinéma didactique à a la Costa Gavras pour nous mettre directement dans l'émotion, sans chercher du tout à être tire-larmes, en occultant tant que possible la représentation directe des massacres. Sans doute est ce ce ce qu'il a ressenti, le petit franco-rwandais Gaël Faye, rentré en France à l'âge de 13 ans, comme son jeune héros.
La suite, c'est quand la violence rejoint le Burundi. Mais les massacreurs ont changé de camp. Les Tutsis veulent venger leurs frères rwandais. Un Hutu travaillait au service de Michel, en bonne harmonie avec les autres employés tutsis; un Hutu parfaitement pacifique: il devra y passer aussi.
Je trouve dommage que ce film n'ait pas été plus vigoureusement soutenu par les média, car c'est un témoignage humain et historique important; sur le plan filmique c'est vrai qu'il n'y a aucune recherche, mais je pense qu'en l'occurrence l'esthétisme eut été malvenu.... Courez y avant que les gros bataillons de la rentrée n'arrivent!