Fort déçue par "Les Neiges du Kilimandjaro" (2011), plus encore par "Une Histoire de Fou", sa fresque mémorielle (2015), et entre les deux, mitigée sur "Au Fil d'Ariane" (2014) - trop de lourdeurs gauchistes dans tout cela, avais négligé "La Villa", il y a deux ans. Abordai donc sans enthousiasme ce "Gloria Mundi", supputant quelque jeu de mots sans-frontiériste...
Ce fut une heureuse surprise ! Le très mélenchoniste Guédiguian a su ici éviter le pamphlet politique (tournant vite au pensum), en narrant sans pathos la vie de petites gens (sur)vivant dans un Marseille plus cruel que pittoresque, auquel siérait sans doute un gilet jaune, saisis lors d'un heureux événement familial, la naissance de "Gloria" (les parents avaient dû voir à la télé une rediffusion du film de Cassavetes). Mais la joie est de courte durée, qui se fracasse sur le quotidien, pesant, sombre, voire sordide
(la jeune mère, "Mathilda" - sa mère à elle appréciant peut-être Mathilda May - ?, pensant qu'une liaison avec le mec de sa demi-soeur valait plan de carrière...)
. Pas de "Misérables" (qualificatif hélas bien galvaudé ces temps-ci..) sans "Jean Valjean"... Celui de Guédiguian (et de son co-scénariste attitré, Serge Valletti) sera un repris de justice au grand coeur, une "longue peine" à honneur (comme en avaient les voyous à l'ancienne), le père de Mathilda, "Daniel" - devenu poète à haïkus à la centrale de Rennes. RG distribue toujours les mêmes acteurs, dont Gérard Meylan (Daniel) - pour moi, le plus émouvant de la distribution. Les Ascaride (la mère), Darroussin ("Richard", le 2e mari), Demoustier (la jeune mère), Stévenin - Robinson ("Nicolas", le jeune père), Neymark ("Aurore", la demi-soeur) tiennent parfaitement leur partie. Même Grégoire Leprince-Ringuet est bon - ce qui atteste de la rigueur de la direction d'acteurs de Guédiguian.
Finalement, voilà un "Sic transit gloria mundi" (des pauvres gens) fort convaincant : belle et forte histoire, mise en scène et photo impeccables, musique (originale et "additionnelle") parfaite.