Le bon fils, le mauvais fils, le patriarche… et la musique
Avec ce 1er film, Vincent Maël Cardona a obtenu le prix SACD à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2021. – Au demeurant, ce film a été présenté dans une foultitude de festivals et y a reçu grand nombre de récompenses -. Alors, on se dit, que ces 98 minutes ont forcément quelque chose de spécial, voire d’hors norme. Une petite ville de province au début des années 80. Philippe vit dans l’ombre de son frère, Jérôme, le soleil noir de la bande. Entre la radio pirate, le garage du père et la menace du service militaire, les deux frères ignorent qu’ils vivent là les derniers feux d’un monde sur le point de disparaître. Pour ceux qui ont vécu les années 80/85, ce drame, entre joie pure et mélancolie, est un retour en arrière plein de nostalgie. Et pour les autres, les plus jeunes, un bain de musique et la découverte d’un autre monde… d’il y a à peine 40 ans.
Pas moins de 6 scénaristes, un dialoguiste et un adaptateur pour mettre sur pied cette histoire qui nous fait mesurer combien la révolution numérique a transformé le monde que nous avons connu en une sorte de songe, une époque lointaine. Ce film nous raconte ce moment – l’histoire commence – ou plutôt finit -, le 10 mai 81, lors de la soirée électorale -, où explosent différentes expressions artistiques, notamment musicales, avec de nouveaux groupes de rock, des fanzines et des radios-sonos. La musique semble avoir compris que ce qui se jouait c’était le passage d’un monde à l’autre et que dans cet autre monde à venir la notion d’avenir avait du souci à se faire. Le mouvement no future est né à cet instant et, 40 ans après, apparaît comme prophétique. L’intrigue se déroule dans une province intemporelle, celle du bistrot, des flaques d’eau, des petites départementales, très éloignée du tourbillon de la grande ville, ici le Berlin Ouest de tous les possibles, où circulait une énergie folle. L’autre film – si je puis dire – nous décrit deux triangles, l’un amoureux, l’autre familial. Tout cela s’entremêle avec habileté et n’engendre aucun moment d’ennui. Un vrai beau film.
Tout comme le réalisateur, le casting formé essentiellement d’acteurs et actrices quasi inconnus. E haut de l’affiche, Thimotée Robart, qui porte le film avec une force et une conviction tout à fait remarquables. On ne demande qu’à le revoir, accompagné, entre autres, de Marie Colomb, Joseph Olivennes… Une mention pour les musiques de David Sztanke. A voir pour y découvrir un réalisateur plus que prometteur et un jeune acteur qui crève l’écran. Complexe, étrange, exalté, un 1er film étonnant de maîtrise et d’originalité. A voir !