Il est évident que lorsqu'on regarde la filmographie de Todd Haynes, « Dark Waters » n'est pas franchement le plus représentatif. Le sujet, d'abord : presque politique, s'intéressant au combat d'un avocat face à un scandale écologique. Une enquête au long cours, rigoureuse, précise, très approfondie, menée avec intelligence par le réalisateur, manifestement intéressé par celle-ci. L'esthétique, ensuite : assez logiquement, l'auteur du « Musée des merveilles » a troqué ses couleurs éclatantes pour un visuel beaucoup plus sombre voire austère, en un mot : hyper-réaliste.
Peut-être un peu long sans que des scènes apparaissent vraiment superflues, l'œuvre frôle le documentaire tout en gardant toujours ce sens de la narration cinématographique l'empêchant de l'être (non pas que ce soit une tare, loin s'en faut!). Pas mal de personnages, très bien interprétés, certains sans doute un peu sous-exploités, mais souvent écrits avec habileté, notamment l'importance grandissante de la situation familiale du héros, mise à mal par les nombreux sacrifices que sa cause exige au quotidien (beau rôle de femme pour Anne Hathaway, dont le point de vue n'est jamais caricaturé).
Ce même protagoniste (Mark Ruffalo, inattendu, impeccable), dont l'approche « anti-spectaculaire », presque ennuyeuse, se révèle inhabituelle et assez originale, même si le but était probablement avant tout de coller au plus près du vrai Robert Bilott. Pas d'enthousiasme, donc, pour un film paraissant presque désuet par son approche très appliquée voire scolaire, clairement pas le titre le plus personnel de son auteur, mais nécessaire et toujours cohérent : j'en sais plus qu'avant d'allumer mon lecteur DVD, ce qui est toujours plutôt bon signe.