Qu’on est mal à l’aise de ne pas avoir adhéré à cette proposition cinématographique d’une originalité plutôt rare. Pire, on se retrouve dans une situation plutôt inédite et paradoxale d’être attristé et déçu de ne pas avoir aimé un film. Voire même ici de s’être copieusement ennuyé devant la nouvelle œuvre d’un auteur qu’on suit et qu’on apprécie en général. Et il est vrai qu’on en est presque gêné. Une situation un peu similaire à ce que l’on a pu ressentir devant l’infernal « Mother » de Darren Aronofsky. En effet, « The Green Knight » de David Lowery ne nous aura pas autant convaincu que ses précédentes réalisations. Ce nouvel opus est typiquement le genre de films qu’on aime ou qu’on déteste, mais dont il est impossible de nier les nombreuses qualités, tout comme les intentions louables et l’incroyable ambition narrative et visuelle dont il fait preuve. Mais, contrairement au tout aussi étrange, particulier et poétique « Ghost Story » qui nous avait totalement envoûté, cette nouvelle proposition du cinéaste nous laisse clairement sur le bas-côté. Néanmoins, il est certain (tout autant que pertinent et compréhensible) que d’autres crieront au chef-d’œuvre.
Lowery choisit d’adapter de manière très littérale un vieil écrit médiéval de chevalerie nommé « Sire Gauvain et le Chevalier vert ». Convoquant le merveilleux et le fantastique aussi bien que l’heroic fantasy et le légendaire, ce récit fait le choix d’être peu bavard et de faire fonctionner le symbolisme à fond. « The Green Knight » c’est un peu comme si un auteur très contemplatif comme Kiarostami ou Andersson se penchaient sur les légendes celtes. Il y a beaucoup de non-dits, de scènes absconses, laissées à notre propre appréciation, de dialogues opaques et pompeux et surtout de longueurs. Et oui que c’est long et ennuyeux! Si l’on n’est pas client, les plus de deux heures que durent le film paraissent clairement interminables. Pire même, on manque plusieurs fois de s’assoupir devant un rythme si nonchalant et autant d’hermétisme narratif. Le film aurait pu envouter par son visuel et son atmosphère si tout cela n’était pas aussi fastidieux, voire même un peu prétentieux, et si les tenants et les aboutissants du script (bien qu’on soit dans une sorte de conte) n’étaient pas aussi nébuleux.
Sinon, ô que oui : « The Green Knight » est beau à contempler. Il est sublime même. Mais quand la complexité et la particularité du fond annihile tous les efforts de forme... Si on ne s’entête pas à tenter de comprendre la signification de l’histoire et à déchiffrer tout le symbolisme en présence on peut apprécier, ou au moins se rabattre, sur le versant esthétique du long-métrage. La direction artistique et la photographie sont en tous points exemplaires et font montre d’un travail d’orfèvre. L’aspect visuel est presque hypnotique faisant parfois penser à certains films de Lars Von Trier sur cet aspect (« Antéchrist » en premier lieu). Les effets spéciaux sont très bons au vu du petit budget, les décors sont impressionnants, qu’ils soient réels ou en images de synthèse, et on se souviendra longtemps de ce Chevalier vert, sorte d’homme-arbre venu de nulle part pour défier notre héros. Bref, un bien drôle de film auquel on ne peut rien reprocher esthétiquement mais pour le reste, on adore ou on déteste.
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