Grégory Magne, qui pour l'occasion réalise son second long métrage après le grinçant L'air de rien (2012), a eu l'idée d'écrire et mettre en scène cette comédie lorsqu'il a été accroché par l'odeur particulière d'un parfum... Il se rappelle :
"Le réflexe, c'est de chercher qui peut bien le porter. Je me retrouve donc, pendant quelques instants, à observer les gens autour de moi, via ce prisme très particulier. Et je me mets à imaginer ce que pourrait être le quotidien d'une personne à l'odorat plus développé que la moyenne. Comment cette faculté pourrait modifier son rapport aux autres, avec quelles conséquences sur sa vie sociale et émotive, sur son caractère. Tout cela semblait propice à faire jaillir un personnage singulier et posait d’emblée un défi de scénario, de mise en scène, de réalisation : mettre les odeurs en images. C'est comme ça qu'est née Anne Walberg."
Grégory Magne ne voulait pas faire un film savant sur les nez ou les parfums. Les "missions" d’Anne Walberg lui sont venues de ce qu'il avait lu ou vu sur le sujet. Par exemple, le réalisateur a eu l'idée de la grotte dont le personnage d'Emmanuelle Devos doit restituer les senteurs à l’identique via le documentaire La Grotte des rêves perdus de Werner Herzog. Mais Grégory Magne s'est tout de même entouré de spécialistes pendant le tournage :
"Il fallait être réaliste et précis dans la terminologie comme dans la manière de le jouer. Une fois le film écrit, je l’ai donc fait lire à plusieurs nez qui m’ont apporté des précisions. Jean Jacques, parfumeur maison de la maison Parfums Caron, m’a notamment été très précieux. Le fait est que cette profession est passionnante. On ne compte que quelques centaines de nez au monde, dont beaucoup ont été formés et travaillent en France. Même si ça évolue, il y a assez peu de femmes. L’une d’elle a plus spécialement conseillé Emmanuelle, Christine Nagel, le nez d’Hermès."
Avec Les Parfums, Grégory Magne retrouve Grégory Montel (petit ami d'Andréa Bescond dans Les Chatouilles et professeur de sciences dans L'Heure de la sortie) qui était dans L'Air de rien. Le réalisateur se rappelle :
"Grégory, je le connais depuis bientôt dix ans. A l’époque, on écrivait L’air de rien avec Stéphane Viard. Michel Delpech nous fait rencontrer Dominique Besnehard. On lui décrit notre personnage et, avec ce sens foudroyant du casting, il nous parle de Grégory Montel, nous expliquant qu’il lui rappelait « Daniel Auteuil jeune. On l’a retrouvé un matin dans un café, on a parlé, déjeuné, repris un café, parlé encore. Il nous a tellement plu qu’on n’a rencontré personne d’autre pour le rôle. Il a cette humanité non feinte sur laquelle les gens ne se trompent pas. Cette fois, j’ai donc écrit directement pour lui. Comme depuis je le connais très bien, je sais précisément ce que je veux entendre. Du coup, c’est plus compliqué pour lui que pour les autres acteurs, parce que si c’est un tout petit peu à côté de ce que je sais être vrai, on refait la prise."
Le conseiller technique Jean Jacques, nez parfumeur de la maison Parfums Caron, s'est dit, après avoir vu Les Parfums, qu'il avait davantage vu un film sur le rapport à l'autre que sur les parfums : "Un rapport d’une richesse infinie où les odeurs jouent un rôle déterminant. Le parfum me semble un outil de connexion et d’écoute sans pareil. C’est fou ce qu’à travers sa puissance on projette de soi sur l’autre. On pourrait croire qu’en créant des fragrances, je consacre ma vie à quelque chose d’assez futile par rapport au monde. Mais ça n’a rien de futile. Travailler le parfum, c’est travailler le rapport à soi et à l’autre. Et Les Parfums le montre très bien."
Avec Les Parfums, comme avec L'Air de rien, Grégory Magne a voulu filmer la France des provinces et des banlieues. "Certainement parce que je viens de là et qu’elle ne m’ennuie jamais. La province et la banlieue racontent l’époque de manière juste et immédiate, les gens, leurs vies. Un parking de supermarché, sa station-service, son lavage-auto, c’est passionnant à regarder. Par ailleurs, la campagne c’était une évidence pour parler des odeurs et faire sentir le film au spectateur. Un sous-bois, un gazon tondu, un bord de mer, cela fait écho chez chacun d’entre nous. Tout comme ce savon jaune des cours d’écoles, cette madeleine qui rappelle à Anne Walberg les colonies de vacances de son enfance", confie le metteur en scène.
Grégory Magne a grandi en Bourgogne. En 2007, il part traverser l’Atlantique en solitaire de la Rochelle à Salvador de Bahia, sur un voilier de 6,5 mètres, sans moyen de communication. Il embarque une caméra pour raconter son quotidien et en tire son premier film, Vingt-quatre heures par jour de mer. Il navigue depuis entre documentaires et fictions, entre scénarios et réalisation. En 2012, il écrit et réalise avec Stéphane Viard son premier long-métrage, L’Air de rien, une comédie grinçante dans laquelle Michel Delpech incarne un Michel Delpech criblé de dettes. Le film révèle Grégory Montel dans son premier rôle. Il retrouve le comédien pour son deuxième long-métrage, Les Parfums.