Le remake de 2019 aurait pu boucler la boucle de la plus brillante des façons. Confié à un réalisateur plus doué que la moyenne, qui avait le grand mérite d’avoir toujours été éloigné du cinéma de genre et de ses automatismes, faisant table rase de tous les épisodes sortis après 1978, il aurait pu constituer l’unique suite digne de ce nom à la légendaire “Nuit des masques”, d’autant plus qu’il reposait sur l’idée assez géniale de tenir compte des quarante ans écoulés entre les deux films, Laurie Strode s’étant préparée toute sa vie à une confrontation qu’elle savait inéluctable avec sa némésis. Les lois du box-office et des franchises étant impitoyables, Michael Meyers, qui semblait avoir été mis définitivement hors-jeu à la fin de cet épisode, se retrouve une fois de plus sur pied et prêt à repartir pour une nouvelle nuit de violence Il s’agit d’ailleurs d’un des éléments qui rompt assez brutalement avec la logique et l’esprit de l’épisode précédent : de psychopathe vicieux et fin stratège, Myers redevient ici un être quasi surnaturel, machine à tuer invulnérable et dotée du don d'ubiquité. D’autre part, comme Laurie Strode comate à l’hôpital durant tout le film, il ne s’agit plus ici d’un duel au sommet mais d’un jeu de massacre à grande échelle à travers toute la ville, presque aussi frontal dans ses débordements d’hémoglobine que les relectures de Rob Zombie (elles aussi passées à la trappe, et c’est plus regrettable). Invoquant plus que jamais les mânes de l’épisode fondateur une bonne partie des personnages de 1978 reviennent, généralement incarnés par les mêmes acteurs), David Gordon Green hésite ici entre le divertissement sanguinolent et l’approche plus psychologique de l’horreur, et finit par négliger le second pour mieux se concentrer sur le premier : ce n’est pas nécessairement un mal mais une légende du calibre d’Halloween mérite quand même mieux que le plus petit commun dénominateur du Slasher. Green lève pourtant quelques lièvres intéressants, comme lorsqu’il imagine que c’est la ville entière qui se soulève contre le tueur et la chape de plomb qu’il fait peser sur Haddonfield, au risque de décharger sa fureur sur un bouc émissaire, ou lorsqu’il lève un coin de voile sur sa vision des motivations profondes du tueur…mais ces bonnes idées arrivent trop tard, ou ne sont pas suffisamment exploitées, pour rehausser le niveau du film. ‘Halloween kills’ laisse donc une impression mitigée, loin de l’unanimité qui régnait autour de l’épisode précédent. Ce sera la mission de l’ultime épisode, prévu pour fin 2022, que de démontrer si ‘Halloween kills’ était l’épisode de trop ou un film de jointure qui ne se débrouillait finalement pas si mal pour préparer la suite.