Il existe encore des fossés comme celui-ci, qui remette en cause l’existence même d’un film. Sans une part croustillante de gaieté ou d’ambiguïté, difficile de s’y intéresser également. Pourtant, quelques soupçons de promesses se dessinent chez Jean-Paul Salomé et cette adaptation du roman d’Hannelore Cayre. La place de la femme et sa révolte semblent être des enjeux majeurs dans cette intrigue policière en manque de repères. Cependant, on finit par perdre tout ce qui touche à cette narration et à l’identité du personnage que l’on suit, au détriment d’un détour comique, non pas inapproprié, mais surtout mal équilibré. Et cela suffit largement à ne plus retrouver la stabilité, dès lors que l’actrice-vedette s’approprie un scénario bancal.
L’interprète judiciaire, Patience Portefeux n’est peut-être qu’un prétexte pour propulser Isabelle Huppert dans un divertissement suffisant. Le double jeu et le contre-emploi de l’actrice pourrait nous laisser sur notre faim, mais il reste tant à développer, tant de choses à conclure, à la suite de certaines décisions scénaristiques douteuses. Les femmes sont fortes ici et ne rechignent devant rien pour affirmer le contrôle sur leur entourage.
Dans le cas, de Patience, on y ajoute un brin de critique vis-à-vis du système, de cette négligence et de sa bienveillance. Il suffit de constater l’emprise qu’elle a sur son supérieur, Philippe (Hippolyte Girardot), un des personnages les plus lucides en fin de compte. Malgré tout, on passe souvent à côté du sujet, en glorifiant un personnage qui peine à convaincre de bout en bout. Il y a plus encore à explorer dans les rues et le secteur malveillant du trafic de stupéfiants. On oublie ainsi les personnages secondaires qui ne servent que la suprématie de cette baronne, ou daronne, dont la maladresse est si peu exploitée.
Ce qui sauve l’honneur se tient encore dans ce portrait de femmes indépendantes, qui se dispensent de l’appui moral et sentimental des hommes. Mais une fois encore, il manque cruellement d’âme dans ce récit. Oser ne suffit pas à prouver que « La Daronne » intercepte les bonnes communications et les bons outils, afin de rendre un peu de visibilité aux minorités et aux communautés de la banlieue parisienne. Et ironiquement, une certaine fantaisie manque à cette escroquerie qui ne se définit que par son interprète et son autorité déguisée, tout comme son film qui peine à déguiser sa comédie policière.