Le Visiteur du futur de François Descraques est adapté de la web-série du même nom qu'il a lui-même scénarisée et mise en scène. Elle comporte 4 saisons et a généré 45 millions de vues, des bandes dessinées, un roman et même un jeu de plateau. Le réalisateur se rappelle :
"Tout a commencé en 2009, dans ma petite chambre étudiante. Avec mon ami Florent Dorin, qui joue le Visiteur, on voulait faire de la science-fiction. On adorait ça. On avait en tête des films comme Retour vers le futur et Terminator, mais on n’avait vraiment pas les moyens qui vont avec ce genre d'idées."
"Et puis on a renversé la contrainte. Il ne fallait pas chercher un moyen de trouver le budget pour faire la SF qu’on voulait, mais il fallait adapter la SF au budget qu’on avait. C’est-à-dire rien. Et là, nous est venue l’idée de ce mec du futur qui débarque dans le présent."
"Tout de suite, ça coûte beaucoup moins cher. C’est le futur qui vient à nous, pas nous qui allons dans le futur. Et puis ça nous faisait rire qu’un type fasse le déplacement du futur avec un message grave et important à délivrer et se retrouve nez à nez avec un mec comme mon frère."
"Soudain, tout nous paraissait simple, évident. On est allés chez Emmaüs, on a créé le costume du personnage en assemblant plein de fringues ensemble, et voilà. Au lieu de tourner un épisode, on en a tourné trois dans la journée. C’est comme ça qu’est né Le Visiteur du futur."
François Descraques a voulu faire ce film dès la fin de la saison 4 de la web-série. Au fil des années, cette dernière a pris de plus en plus d’ampleur : "On savait qu’on n’allait pas faire de saison 5, j’ai donc bouclé pas mal d’intrigues pour me laisser la possibilité de continuer le Visiteur ailleurs. C’était en 2014."
"J’ai mis quasiment sept ans à trouver la bonne façon de porter le Visiteur au cinéma. Il fallait une histoire qui soit dans la continuité de ce que l’on avait créé depuis plusieurs saisons et qui puisse en même temps s’adresser à tout le monde, tout en faisant sens au format long métrage."
Le Visiteur du futur est un film sur le conflit entre générations comme l'explique François Descraques : "Quand on a cinquante ans, on ne voit pas du tout le futur de la même manière qu’à vingt ans. Les jeunes envisagent l’avenir à long terme, ils ont pleinement conscience du temps qu’ils ont devant eux et de tout ce qui peut arriver."
"Plus on vieillit, plus on perd ça, naturellement. Je voulais raconter ce conflit, et je suis très vite arrivé à ces deux nouveaux personnages : un père et sa fille. Lui veut trouver des solutions maintenant, pense au présent. Elle, elle voit les conséquences et pense au futur."
S'il avait bien sûr envie de satisfaire les adeptes de la série, François Descraques n'a pas voulu réaliser un film de fans. Il a plutôt cherché à trouver un équilibre, en adoptant un autre point de vue et en inversant un peu les règles. Il précise :
"Je crois qu’ainsi le film parle aussi bien aux fans qu’aux gens qui découvrent l’univers. Il y a des clins d’œil, des détails qui sont directement là pour « récompenser » celles et ceux qui ont suivi toute la série. Mais le film met tout le monde au même niveau, très vite."
"La scène d’introduction, je l’ai vraiment écrite pour ça. Je voulais que les gens qui découvrent l‘univers comprennent tout en quelques minutes, et que les fans s’amusent en même temps. Je sais que la série a touché beaucoup de gens, qui aujourd’hui ont grandi et qui viennent me voir avec leurs enfants à présent."
"Et j’ai vraiment voulu que ce film soit le film du samedi soir pour toute la famille, le film que tu vas voir aussi avec tes potes, un film ouvert à tous, comme ceux que moi j’allais voir dans les années 90."
Le Visiteur du futur est un film de science-fiction mais aussi une comédie et un drame. François Descraques explique que le ton du film s’est imposé par son sujet : spontanément, le drame s’est invité dans la SF. Le metteur en scène précise :
"Ce conflit père-fille, je ne pouvais pas le traiter comme un prétexte. Toute la question de l’écologie, très présente dans le scénario, appelle forcément un regard critique et une prise de conscience des personnages."
"C’est un film qui pose simplement la question de la relativité du temps et de nos actions : un bienfait à court terme vaut-il une tragédie à long terme ? Et les deux points de vue se valent dans le film. Alice et son père ne sont pas des personnages de comédie."
"Donc c’est forcément intéressant de les mettre face à la bande du Visiteur qui, eux, sont des personnages avec des rythmes de comédie. Et, très vite, je me suis rendu compte que ça matchait à l’écran. La gravité et les enjeux dramatiques du film sont portés par la loufoquerie et l’humour."
Pendant l’écriture, les producteurs de François Descraques lui disaient : "Ne te mets pas de limite. Ne pense pas à l’argent. Écris le film comme si tu avais douze millions". Malgré cela, le cinéaste a tout de même dû s’adapter à un budget et être un peu débrouillard. Il se souvient :
"Toute l’expérience web et TV m’a été très utile à ce moment-là. À l’écriture ou à la mise en scène, j’ai toujours dû m’adapter et trouver des moyens pour donner vie à ce que j’avais imaginé. Et ça, c’est grâce à mon équipe. On travaille ensemble depuis des années et on a appris ensemble à se débrouiller."
"C’était beau de voir tout le monde travailler sur ce film, avec certes nettement plus de budget qu’au début, mais toujours ce besoin de débrouille. Il faut toujours avoir de l’ambition, surtout quand on n’en a pas les moyens. Ce film, c’est toujours de l’artisanat. Mais avec un peu plus d’expérience qu’il y a treize ans."
Florent Dorin, qui incarne le héros de la web-série, reprend son rôle pour les besoins du long métrage. Il explique : "Je crois que ce qui me plaît beaucoup chez lui, c’est que, justement, on ne saura jamais vraiment qui il est. J’aime beaucoup l’idée que ce soit à la fois un super-héros et un mec complètement instable et inquiétant."
"Il veut toujours faire au mieux mais manque clairement de sagesse et de clairvoyance. Et surtout, il a un ego très mal placé, ce qui est forcément très drôle et touchant. Le personnage est né au départ comme un gag. Et puis, petit à petit, il a fallu lui donner plus de consistance, plus d’enjeux."
Dans la scène post-générique du film, François Descraques a opté pour un clin d'œil aux aficionados de la première heure du Visiteur du futur et a simplement inclus le tout premier plan tourné par Florent Dorin à l'époque du lancement de la web-série, en 2009.
On peut voir l'acteur débarquant en tenue du Visiteur du futur au milieu d'un sentier, pendant que le personnage de Raphaël Descraques s'apprête à jeter une canette à la poubelle. Florent Dorin crie alors après lui : "Surtout, ne lance pas cette canette !"
François Descraques, qui voulait une scène se déroulant dans le passé, a choisi la Première Guerre mondiale pour des raisons pratiques. Ainsi, les champs de bataille propres à cette guerre ressemblant à des terrains vagues, et il a donc été plus facile de les retranscrire à l'écran sans devoir se lancer dans des travaux de décoration trop complexes.
Il y avait 20 figurants à qui le réalisateur a demandé de courir en boucle pour donner l'impression qu'il y en a des centaines. Parmi eux, seuls deux étaient cascadeurs et avaient pour lourde tâche de simuler les dizaines de chutes que l'on voit à l'écran ! Les costumes d'époque et l'armement ont pu donner l'impression qu'ils étaient beaucoup plus nombreux.