Boris Lojkine consacre son deuxième long métrage de fiction au destin brisé de Camille Lepage, photojournaliste assassinée à seulement 26 ans en Centrafrique en 2014. Dépassant la notion de simple biopic, « Camille » est avant tout le récit initiatique d’une jeune femme idéaliste convaincue de l’importance de raconter les populations oubliées de ce monde et de leur venir en aide, malgré la complexité et la violence des guerres civiles qui les déchirent… Camille Lepage aurait péri dans des circonstances non encore élucidées, mais il se peut qu’elle ait été victime d’un échange de tirs entre milices anti-balaka (chrétiens) et Séléka (musulmans). La seconde partie du film la montre « embeded » dans une colonne d’anti-balaka, commandée par un certain Cyril, étudiant qu’elle a rencontré à l’université à son arrivée en Centre Afrique… elle participe à des raids à moto, photographiant le quotidien de ces combattants, étrangement accoutrés en néo-Mad Max de brousse. Elle y apparaît alors sans mission précise, plus free-lance que jamais et dangereusement seule dans une des zones les plus risquées du pays. La voix off de Nina Meurisse, qui interprète Camille Lepage, exprime sur de ces images de chevauchées guerrières un sentiment de plénitude et de liberté, oubliant les conseils de ces photographes et journalistes aguerris qu’elle accompagne lors de son précédent séjour, et qui lui avaient vivement conseillé de ne jamais s’impliquer pour un camp ou un autre…. L’idéalisme de la jeune femme, porté par sa foi réitérée sur la nécessité vitale du témoignage, l’aura donc conduit à outrepasser les limites de sa profession, jouant sa vie face à la mort qu’elle photographie…. Boris Lojkine a voulu reconstituer au plus juste quelques scènes de violences cadrées et photographiées par Camille Lepage, si bien qu’au montage alternent, dans une certaine confusion, la fiction et l’archive, le faux sang et le vrai, les cris, menaces et exactions simulés et la trace tangible de la terreur intercommunautaire…et malgré tout, 90 minutes de film ne m’auront pas permis de comprendre le fond de l’histoire, cette guerre civile terrible et proche, ne voit-on pas le discours de Hollande annonçant la saisine du Conseil de Sécurité et des soldats français accueillis avec joie mais bien impuissants devant certaines scènes de violences…impossible dans ces conditions d’avoir une vraie lecture des évènements…Mais Nina Meurisse est remarquable au milieu d’acteurs locaux ayant vécu ces évènements…Le festival du film de Locarno (Suisse) a décerné au film, le prix du public et Nina Meurisse a reçu le prix d’interprétation féminine au Festival du film francophone d’Angoulême…