Réalisé un an avant la chute du mur de Berlin, Les Ailes du désir se révèle ambitieux et empreint d'une très grande poésie. Dans l'univers de Wim Wenders, les villes sont peuplées d'anges qui réconfortent les humains. Mais, condamnés à errer pour l'éternité, privés des plaisirs offerts par les cinq sens, ils se questionnent sur leur statut d'esprit. Tombé amoureux d'une trapéziste, l'un d'entre eux va choisir de passer du côté des humains pour vivre son idylle. Un film remarquable par bien des aspects : la mise en scène, l'image, la photo – qui oscille du noir & blanc à la couleur – sont absolument époustouflants. Le cinéaste rend d'abord et avant-tout un extraordinaire hommage à la ville de Berlin, que l'on observe à la fois meurtrie – la ville est toujours coupée en deux, les stigmates de la guerre sont encore très présents – et déjà bouillonnante culturellement. Les prises de vues du concert de Nick Cave & The Bad Seeds illustrent ainsi la vitalité de scène berlinoise de ces années. Mais au-delà de cet aspect, c'est l'âme même d'une ville que le cinéaste ambitionne de filmer à travers son passé, ses blessures, ses habitants, sa musique, ses bâtiments, son art de rue, son si terrible mur... Tel est l'autre grand propos du film : Wenders veut croire que le cinéma est capable de sonder l'essence même des gens et des lieux. Son long-métrage se mue en une réflexion sur le pouvoir des images, couplée à une magnifique déclaration d'amour au cinéma. Seuls l'art et le cinéma peuvent traduire l'âme d'un peuple, et peuvent unifier les corps et les esprits. Et seuls l'art et le cinéma peuvent aider à apaiser des blessures de l'histoire encore saignantes. Hélas, le film pêche par excès d'intellectualisme. La faute à des dialogues trop longs et trop abscons, au style très marqué par les années 80 qui affaiblissent un peu l'œuvre. En bref, une œuvre aux mille chemins, très intéressante à commenter, que l'on a envie d'adorer... mais un peu longue à regarder.