Dernière réalisation de Rian Johnson, sortie le 27 novembre 2019, À couteaux tirés ou Knives Out dans la langue de Boris Johnson, nous invite à devenir des Sherlock Holmes en herbe dans ce thriller à la sauce Cluedo.
Le réalisateur et scénariste n'en est pas à son premier essai en matière de film d'enquête. En 2005, sortait déjà Brick, film noir avec le jeune et désormais célèbre Joseph Gordon-Levitt. En 2012, Johnson réitère avec Looper, dans un style différent, à la fois futuriste et fantastique.
Une approche moderne et qui vient trancher avec les codes qui caractérisent le "detective story" classique.
Exit le chapeau melon et la moustache épaisse, le film se veut plus moderne dans son approche, drôle, voire d'un second degré totalement assumé.
L'histoire se déroule au sein d'une famille blanche bourgeoise vivant aux Etats-Unis, dans laquelle travaille Marta Cabrera, jeune infirmière et fille d'immigrée.
Au lendemain de son anniversaire, Harlan Thrombley, riche patriarche et auteur de polar à succès est retrouvé la gorge tranchée dans le manoir familial. A première vue, si tout laisse penser à un suicide, la vérité est peut-être ailleurs. C'est le sentiment de Benoit Blanc, célèbre et excentrique détective privé, engagé pour en savoir plus. Après tout, qui de mieux que l'agent 007 pour résoudre une enquête de cette envergure.
À couteaux tirés est une réussite dans un paysage cinématographique qui manque de films d'enquête
Poignant et original dans son approche le film nous garde en haleine. L'écriture de Rian Johnson est efficace. On voit que ce dernier s'est appliqué à travailler aux oignons l'effet visant à nous surprendre tout au long du récit. Le film ne cesse de nous mettre sur des pistes différentes, bousculant nos certitudes d'un twist à l'autre. On note l'habile changement de perspective pour le spectateur, dans la première partie du film.
La mise en scène bien qu'étant classique est propre et sert parfaitement le propos du film. L'utilisation de plans bien choisis renforcent la sensation d'immersion et de proximité avec les personnages.
La photographie, quant à elle, donne une touche old-school au film. Le manoir y contribue également. Théâtre de l'action et véritable membre de la famille, quelques beaux plans larges, viennent le mettre en valeur.
Un petite regret quant à l'âme de l'affiche qui n'est pas présente dans le film. On y perd le côté excentrique, la tonalité du film étant plus grise et les personnages relativement classiques.
Un casting "cluedoesque" digne des All-star game
À couteaux tirés bénéficie d'un casting digne d'un film des Avengers. Mention spéciale à Jamie Lee Curtis, tant elle incarne bien la cheffe de meute amère, d'une famille particulièrement détestable.
On apprécie de retrouver Chris Evans dans un rôle autre que celui du bon boy-scout. Anna de Amas nous prouve qu'elle peut être le personnage principal et Daniel Craig tape dans le mille avec son personnage piquant, drôle et arrogant.
Le réalisateur envisage d'ailleurs, une suite de ses aventures.
Si tous les protagonistes ont une personnalité bien identifiable et à la limite de la caricature, ils laissent place à des situations drôles, voire caustiques.
Rian Johnson s'en sert pour nous livrer une satire des Etats-Unis à notre époque. Ainsi, sont mises en scène les divergences qui animent le débat politique américain, notamment sur l'immigration. On y aborde également les questions liées à la famille et à l'héritage.
À couteaux tirés offre un final qui parvient à nous surprendre
Malgré quelques ficelles bien visibles, qui dénotent d'une volonté de Johnson d'en dire beaucoup (voire trop), comme pour nous induire en erreur, À couteaux tirés s'avère être un puzzle ingénieusement construit.
Le message est clair et l'on rentre facilement dans le film, qui s'avère être plus terre-à-terre que prévu.
La fin est jouissive et n'est pas sans rappeler les conclusions d'enquêtes iconiques à l'image de celles de l'inspecteur Columbo. On note l'utilisation très subtile de Set Up/Pay Off qui plairont à coup sûr.
En conclusion, dans un paysage cinématographique qui ne propose finalement que peu de réalisations de ce genre, on apprécie de s'écarter des clichés qui le caractérisent.
À couteaux tirés est un film à voir. On ne peut qu'espérer revoir Benoit Blanc, prochainement dans les salles de cinéma.