Le sentiment qui domine après avoir vu ce film est la frustration. En effet, j'avais pris connaissance avec enthousiasme de l'existence de ce film : enfin un long-métrage français, avec un budget relativement conséquent, sur une guerre trop souvent oubliée de notre cher cinéma, la guerre d'Indochine. Hélas, on est loin du Platoon français que l'on appelait de nos vœux !
Commençons par les points forts (ce sera rapide). Les costumes sont d'une grande fidélité historique. La photographie est belle, ce qui permet d'installer une atmosphère crédible. Les performances des acteurs sont correctes. Néanmoins, leurs propos sont parfois inaudibles (problème de micro?). Certaines scènes sont bien réalisées, à l'image de l'(
embuscade contre les Japonais
). Le caractère aléatoire et parfois absurde de la guerre est dépeint avec acuité : les occasions de mourir en héros sont rares,
la folie en emporte plus d'un deux et les corps sont éprouvés
.
Venons en au vif du sujet. Le film traîne, manque cruellement de rythme. Le scénario est insuffisant et incompréhensible parfois. D'abord, une forme de contextualisation historique eût été bienvenue : c'est une période peu connue qui mérite un éclaircissement. De plus, le réalisme du film pose question. Tout au long du film, le spectateur se demande pourquoi l'armée japonaise qui, en avril 1945, et déjà mise en échec par les Américains dans le Pacifique, traque avec autant d'insistance un groupe d'éclopés, de vieillards et d'illuminés. Par ailleurs, l'amateurisme consternant de
l'adjudant, pourtant supposé être expérimenté
paraît invraisemblable, surtout dans la situation de ces légionnaires. Le réalisateur souhaite-t-il livrer un commentaire sur l'incompétence de ces légionnaires ? Un des personnages fait allusion à Camerone : y a-t-il une forme d'ironie ? Les motivations des personnages sont très floues. Leur caractérisation manque de cohérence. Le choix du scénariste/réalisateur d'accorder tant d'importance au personnage du
déserteur
, sans expliciter les raisons de son insubordination, nous laisse perplexes. La morale est difficile à saisir : que cherche à dire David Oelhoffen ? On peine à trouver un message (antimilitariste ? antiguerre ?). Il est plus probable qu'Oelhoffen se cherche encore. C'est son quatrième long-métrage : on s'impatiente. Il se perd dans la jungle laotienne, nous présente des personnages indistincts, aux contours peu définis : après une heure de film, on continue à les confondre plus ou moins. Des incantations fumeuses et des marmonnements incohérents ne font pas une personnalité ! Et encore, ne me lancez sur l'aspect caricatural, voire problématique, de certains protagonistes. En outre,
pourquoi le personnage anarchiste lance des slogans franquistes ?
La fin est assez représentative de l'ensemble du film : on ne comprend pas vraiment
les actions du dernier survivant de la section
. Cette absence de clarté, si elle est volontaire de la part du scénariste/réalisateur, apparaît comme une facilité.
Si la période vous passionne, vous pouvez toujours vous y risquer (le film dure quand même deux heures), sinon passez votre chemin.