Le Cercle des neiges est une histoire vraie qui fait mal au cœur, qui appelle notre compassion pour ce groupe d'hommes piégés dans le froid de la Cordillère des Andes, avec pour seule nourriture les cadavres de leurs amis... Si on peut comprendre le choix de Juan Antonio Bayona pour cette nouvelle adaptation (il y a déjà eu 4 films autour de l'accident, notamment une adaptation nommée Les Survivants avec le jeune Ethan Hawkes), lui qui flirte d'habitude si bien avec les émotions liées à la peur viscérale et au désespoir (The Impossible, L'Orphelinat, Quelques minutes après minuit...), on peut néanmoins regretter qu'il se soit senti obligé de surligner grossièrement son style (demande de Netflix, peut-être pour coller avec un public-cible plus jeune ?). Ainsi le crash du début montre ses limites visuelles (les acteurs secoués comme des cocotiers sur leur sièges par les techniciens qu'on devine cachés derrière les dossiers, passe encore - c'est "à l'ancienne" - mais les trucages numériques de la carlingue qui se démonte et glisse sur la neige sont mal faits), ainsi les acteurs en font des caisses, ainsi le côté "cannibalisme versus religion" prend toute la place dans le récit. Les rares embardées du côté du survivalisme (la rando pour aller trouver des objets, les fabrications d'instruments à partir de débris, les passes-temps pour tromper la peur et la souffrance...) sont des sous-intrigues qui auraient gagné à ne pas se laisser "bouffer" (pardonnez l'expression) par l'aspect moral qui est omniprésent (en réalité, les gars ont vite adopté la pratique, quand ils en sont arrivés à perdre 30kg - ce qui ne se voit pas, étrangement, dans ce film... -, ils ne se sont plus trop posé la question). Idem pour le visuel, Bayona abandonne complètement sa finesse pour devenir un produit Netflix avec une mise en scène balourde qui est à l'opposé de ce qu'il a pu faire autrefois : adieu l'émotion qui passe par le récit d'un personnage cabossé, sans rien besoin de plus (un gars assis sur sa chaise en plan fixe qui raconte comment le bout de papier qu'il tient est le seul vestige de sa femme et sa fille dans The Impossible, un enfant qui tient la main de sa mère pour la dernière fois sans un mot dans Quelques minutes...), et bonjour les gros artifices qui tâchent (les scènes d'hallu qui sont sur-découpées, en effet œil de poisson, les scènes émotions qui balancent la musique au violon... On n'y a jamais cru, la mise en scène est un forcing constant). Il n'en reste pas moins que ces 2h30 (abusives) se laissent regarder une fois, par curiosité du sujet, par compassion pour les survivants mais aussi ceux qui ne sont plus là, permet à Bayona de ne pas se faire oublier du public (le film est le carton de la plateforme, on espère que cela lui donnera les fonds nécessaires pour se relancer au cinéma), et qu'il pourra ouvrir l'envie de découvrir les docus et films sur l'accident terrible de ce vol 571... Ou d'aller rattraper les autres œuvres de Bayona, la garantie de planer sans jamais se crasher.