Un film sur la liberté d'expression corporelle au sens large (artistique, sexuelle, sociale…). Tout empreint d'audaces et de fulgurances. L'histoire a quelque chose des tragédies classiques (dans son côté moralement transgressif, dans ses manipulations, dans le canevas familial qui se trame), tout en étant très moderne. La sensibilité exacerbée y est incandescente, tout en faisant froid dans le dos parfois. La narration, fragmentée, fascinante, inconfortable, avance par bribes d'amours cruelles, d'instinct maternel meurtri, de désirs fous, de danses cathartiques. Et tout passe par le personnage central, personnage irradiant. Portrait de femme complexe, contradictoire, sans limite. Servi par une actrice, Mariana Di Girólamo, qui magnétise l'écran comme on a rarement vu. Ses regards et sa gestuelle. Son androgynie troublante. Son côté instinctif et calculateur à fois. Son effronterie. Cette histoire d'émancipation féminine, intense et chaotique, se déploie dans un Valparaiso électrique, joliment capté, et dans un environnement sonore très travaillé (bande son de Nicolas Jaar). Le bouchon est probablement poussé un peu loin à la fin, dans un registre de mélodrame trash. Mais le film demeure une expérience unique, mémorable.