Revenir est le premier long métrage de Jessica Palud. Âgée de 37 ans, Jessica est entrée professionnellement dans le monde du cinéma en 2003, en tant qu’assistante réalisateur sur "Innocents – The Dreamers" de Bernardo Bertolucci. Elle a collaboré ensuite à la réalisation de plusieurs longs métrages, dont trois auprès de Philippe Lioret. En 2016, elle a réalisé un premier court-métrage, "Poupée", puis, en 2017, "Marion", un court métrage de 19 minutes, sélectionné dans plus de 150 festivals et couvert de prix un peu partout. "Revenir", adaptation très libre du roman « L’amour sans le faire » de Serge Joncour, faisait partie de la sélection Orizzonti lors de la dernière Mostra de Venise, en septembre dernier, et il y a obtenu le Prix du meilleur scénario.
Franchement, dans une période où on observe une grande inflation dans la durée des films, on aimerait être confronté plus souvent à un film comme "Revenir" : pensez donc, un film qui ne dure que 77 minutes mais qui, grâce à ses qualités de concision et de précision, réussit dans ce court laps de temps à nous entretenir de nombreux sujets, avec, à la fois, force et intelligence. C’est ainsi qu’on passe de la mauvaise relation entre un père taiseux et son fils pas très bavard (on ne saura jamais vraiment les raisons de cette opposition qui a entrainé le départ du fils vers un pays lointain) à la naissance d’un coup de foudre, de la maladie d’une mère à l’attachement ressenti par un oncle pour son très jeune neveu, de la vente des vaches d’une exploitation agricole pour couvrir ses dettes à la découverte par le fils de la vérité concernant la mort de son frère, de la vision d’une exploitation agricole qui a été poussée au déclin par la spirale infernale vécue par de nombreux paysans (dettes, on vous pousse à grossir, pour, soi-disant, mieux vous en sortir, emprunt, dettes) à celle d’une exploitation voisine qui, elle, vit bien grâce à son passage au bio. Un montage précis, de belles images d’une région baignée par le soleil, une grande délicatesse plutôt qu’un didactisme appuyé dans la façon dont tous ces sujets sont abordés, ces qualités importantes font que ce qui pourrait laisser penser à un « petit » film reste en fait profondément ancré dans les souvenirs.
Après "Petit paysan" et "Au nom de la terre", voici un 3ème film de fiction français qui nous parle des problèmes du monde paysan. Même s’il s’agit dans ce film d’un sujet parmi d’autres, c’est, des trois, celui qui en parle le mieux, avec, en particulier, l’évocation des raisons qui poussent certains paysans à se suicider et une comparaison favorable au choix de l’agriculture biologique plutôt que celui de l’agriculture intensive chère à la FNSEA et aux banques, un choix qui pousse à l’endettement, aux difficultés financières et, parfois, trop souvent, au suicide.