Après l'énorme succès de Blanche-Neige et les sept nains, Walt Disney savait que ce coup de maître ne serait pas une réussite sans lendemain. Dès 1936, il mettra en chantier parallèlement plusieurs projets de films, parmi eux se trouve celui qui constituera son deuxième chef d’œuvre animé : Pinocchio tiré du conte italien de Carlo Collodi "Le Avventure di Pinocchio, storia di un burattino" (1881). Il était une fois... Geppetto, un fabricant d'automates, qui rêvait d'avoir un enfant. Il créa avec tendresse un pantin de bois qu'il appela Pinocchio. La nuit, alors qu'il dormait, la Fée Bleue donna la vie à Pinocchio. Aidé de Jiminy Cricket, son ami et sa conscience, il devra apprendre la bravoure, l'honnêteté et la loyauté qui pourront faire de lui un véritable petit garçon. En s'inspirant librement du conte, Walt reconduit la même équipe (scénaristes, animateurs etc...) dans ce nouveau projet ambitieux qui va nécessiter de nouveaux moyens humains et techniques mais qui va également prendre énormément de retard en raison de la complexité de l'histoire et de sa noirceur. Pourtant Walt va réussir à poser l’intrigue du film en mettant en avant le souhait de Pinocchio de "devenir un vrai petit garçon" en le joignant avec un autre personnage principal Jiminy Cricket qui deviennent le tout premier duo héroïque de l'animation. Pinocchio animé simultanément par Milt Kahl (anatomie), Fred Moore (humanisation), Frank Thomas (expressions du visage) et Ollie Johnston (gestuelle et sentiments) à la fois potelé et habillé d'un costume tyrolien est l'archétype parfait de l'enfant naïf et influençable. La conception graphique de Jiminy Cricket sera confié à Ward Kimball qui l'animera et le supervisera entièrement. Jiminy est le personnage majeur et central du film : à la fois le narrateur de l'histoire, il est l'ami, la conscience, le mentor et le soutient constant de Pinocchio en lui enseignant comment distinguer le bien du mal. Il possède une personnalité attachante avec des petits travers qui le rendent encore plus humain et permettent que l'on s’identifie d'abord à lui. J’attribue une mention spéciale à Figaro animé par Eric Larson qui a réussi à lui donner une personnalité digne d'un gosse en bas âge sous l'anatomie d'un chaton à la fois comique (scènes avec Pinocchio) et têtu (scène du repas avec Cléo). Gédéon et Grand Coquin animés par John Lounsbery inaugurent un autre duo cette fois burlesque, sous leurs apparences hautaines et snobs, ils cachent en réalité leurs réelles motivations à servir les méchants principaux du film (Stromboli et Le Cocher) mais le plus souvent ils nous font rire notamment lorsqu'ils se font passer pour des faux médecins en affirmant un diagnostic imaginaire à Pinocchio (digne de la Commedia dell'arte^^). Enfin Monstro la baleine animé par Wolfgang Reitherman apporte sa dose d'action en rendant l'effet de masse et de puissance capable de générer l’effroi. Le film comporte une technique et une beauté visuelle incomparable notamment lorsque Pinocchio se rend à l'école (magnifique travelling de la caméra multiplane depuis le clocher jusqu'à chez Geppetto) rendant un effet de profondeur incroyable, un côté magique pour les effets spéciaux (les apparitions de la Fée Bleue), un côté festif (les marionnettes de Stromboli, l'arrivée sur l'île Enchantée) et un côté très sombre et effrayant (emprisonnement de Pinocchio, la transformation de Crapule en âne) et le tout dirigé par Hamilton Luske et Ben Sharpsteen à la réalisation ainsi que par Leigh Harline, Paul J. Smith et Ned Washington à la musique qui aura toujours une place très importante chez Disney sublimée par des chansons magnifiques comme "Sifflez vite, vite"; "La vie d'artiste"; "Sans aucun lien" mais celle qui restera dans les annales c'est "Quand on prie la bonne étoile" qui aura un immense succès et deviendra l'hymne officiel de la Walt Disney Company mais aussi pour ses parcs à thèmes à travers le monde. Fort d'un scénario étoffé, de décors grandioses, de personnages attachants hauts en couleur et de sa technique d'animation, Pinocchio et sans aucun doute l'apogée de l'art ultime de Walt Disney et aucuns films ne pourraient aujourd'hui bénéficier d'autant de soins et de moyens. Ce nouveau long métrage est tellement époustouflant qu'il relèguerait Blanche-Neige au rang d'expérimentation. Pinocchio est assurément "LE" film d'animation s'étant le plus rapproché de la perfection et dont la qualité n'a jamais été égalée depuis. Pourquoi ? Une seule raison majeure : la volonté de perfection de Walt Disney et son constant souci d'aller toujours de l'avant. Le 2ème Chef-d’œuvre de Walt Disney.