Film de zombie version décalée, casting impressionnant, mélange entre l’horreur et l’humour et film d’ouverture à Cannes, on attendait beaucoup du nouveau film de Jim Jarmusch, le très médiatisé The Dead don’t Die.
Au résultat, on se retrouve face à un film plaisant certes, mais qui déçoit par son côté bâclé, comme si Jarmusch (apprécié pour la grâce avec laquelle ses films scrutent le quotidien et pour sa maîtrise de l’absurde) n’avait pas pris la peine de construire un film original et convaincant de bout en bout, préférant s’en tenir à quelques trouvailles, distrayantes et amusantes certes, mais insuffisantes pour séduire le spectateur.
The Dead don’t Die est un de ces plats que l’on commande au restaurant. Sur le menu, la recette est alléchante et semble originale, les ingrédients de qualité et le chef reconnu. Mais lorsque vous passez à la dégustation, malgré des premières bouchées convaincantes, vous réalisez rapidement que le plat, s’il est bon, est un peu en dessous de ce que l’on vous a vendu.
Dans un premier temps, le film de Jarmusch séduit. Par cette ambiance particulière qui pioche dans les codes du film d’horreur et rappelle la mélancolie qui baigne les précédents longs-métrages du cinéaste. Par une galerie de personnages étonnants, du fermier raciste au policier désabusé incarné par un Bill Murray franchement drôle. Et par des trouvailles qui font sourire, comme les références à la filmographie de l’auteur ou le côté méta présent tout au long du film. Par l’ironie, aussi, avec laquelle Jarmusch tend un miroir à la société, donnant à voir une Amérique cliché où l’inaction face à la sortie de la Terre de son axe suite à la surexploitation des ressources. Pas de doute, Jarmusch a su s’emparer du genre pour livrer un film original et décalé, à la fois drôle et malin, bourré de clins d’oeil à l’actualité ou aux filmographies des acteurs et du réalisateur.
Mais très vite, le film tourne court, et tout ce qui avait attisé notre attention s’essouffle rapidement. Le film de zombie décalé se mue en film de zombies on ne peut plus classique (à la nuit tombée, les morts-vivants vont dévorer les humain, voilà tout) et bien trop long. Les personnages atypiques versent tellement dans l’absurde qu’on en vient à se demander si cette pléthore de caractères a vraiment une utilité, alors que le trio principal s’avère creux et sans grand intérêt. De même, les références au répertoire de l’auteur et le jeu du « film dans le film » sont des ficelles trop attendues et trop peu exploitées pour convaincre. Cerise sur le gâteau, le film s’achève sur une conclusion classique, qui traîne en longueur et se voit desservie par une morale maladroitement explicitée. Comme si tous les bons ingrédients qui avaient mis en bouche le spectateur ne formaient plus une recette efficace. Et que la malice et l’intelligence du réalisateur, au service d’un dosage efficace entre le rire, l’absurde et la satire du racisme et de la société matérialiste, avait fait place à une banalité décevante.
Un peu comme si Jarmusch avait eu une bonne idée et quelques belles trouvailles, mais ne s’était pas foulé plus que ça pour mettre à profit ces ingrédients et proposer vrai bon film. Compterait-il seulement sur son nom et son casting? Au final, un film qui reste plaisant et divertissant, même si le banal vient trop vite remplacer l’humour mordant et la satire malicieuse qui nous avaient plu.