Avec « Mon chien Stupide », Yvan Attal propose un long métrage plein de qualités, mais aussi de quelques défauts, sur la crise de la cinquantaine, la paternité et l’angoisse de la page blanche. On ne peut pas dire que le sujet soit ultra orignal, c’est certain. En choisissant d’adapter un roman de John Fante (pas lu), il nous offre un film agréable, qui dans ses deux premiers tiers fonctionne très bien. On rentre immédiatement dans l’action à l’aide d’une voix of qui a la bonne idée de s’éclipser rapidement. Le rythme est enlevé, l’humour est efficace, on s’attache aux personnages et singulièrement à ces deux époux qui s’aiment encore mais qui n’arrivent plus à communiquer. Les rôles des adolescents sont certes un peu caricaturaux, mais ces 4 gamins (particulièrement gratinés) offrent l’avantage de balayer tout le spectre des poncifs adolescents. Le pauvre couple Mohen a la « chance » de taper dans chaque catégorie : celui qui fume toute la journée et sort avec des bimbos, celle qui fréquente un amoureux de l’ordre et du drapeau, celui qui ne glande rien à la fac et ne pense qu’au sport et le dernier qui fricote avec des activités écolos un peu trop exaltés : le poker gagnant, en quelque sorte ! Le hic, avec « Mon chien Stupide », c’est que le dernier tiers du film, interminable, tourne un peu à vide. Embarrassé d’une musique trop envahissante, le film n’en finit pas de finir. Une fois les 4 adolescents partis, Henri se retrouve au final plus désœuvré que seul, et le film peine à maintenir l’intérêt du spectateur. Mais pris dans son ensemble, « Mon chien Stupide » est un film agréable à suivre, bien réalisé, bien monté et plutôt maitrisé. Yvan Attal et Charlotte Gainsbourg se retrouve à l’écran, dans des rôles qui leur vont bien, eux qui sont en couple depuis plus longtemps encore que leurs personnages. Ils sont parfaits tous les deux, et on se dit qu’ils font un joli couple sur l’écran en plus d’un faire un beau à la ville. Les 4 adolescents sont plutôt bien incarnés aussi, ils ont tous l’occasion, à un moment du film, de faire passer autre chose que leur caractère d’ado insupportable, d’avoir leur petit scène plus intime à eux. Mention spéciale à Panayotis Pascot l’ancien chroniqueur de « Quotidien », que je n’ai pas du tout reconnu sur le moment dans le rôle de Gaspar, ce qui prouve qu’il s’est parfaitement effacé derrière son personnage. Les seconds rôles « hors famille » sont peu nombreux, et n‘ont malheureusement pas beaucoup d’occasion de briller, à part peut-être Sébastien Thiery en joggeur souffre-douleur du chien. Le chien, justement, parlons en un peu… C’est un énorme Mâtin de Naples (c’est la race en question parait-il) qui joue très bien le rôle du molosse baveux et libidineux. Personnellement je n’aurais aucune envie de garder un chien comme celui-là mais j’imagine qu’ils ont leurs amateurs ! Le scénario est adapté de John Fante. Je n’ai pas lu le livre, alors je ne peux juger que du scénario et de sa tentative de jouer sur la corde délicate du politiquement incorrect. Derrière les thèmes repérés d’emblée : la crise de la cinquantaine du type qui roule en Porsche, la page blanche de l’écrivain écrasé par un premier et unique chef d’œuvre, l’évènement perturbateur (ici le chien) qui vient bousculer un quotidien endormi et révèle le quinquagénaire à lui-même, il y a une volonté, plus ou moins réussie, de flirter avec les limites du politiquement incorrect. Quand on prend un peu de recul, ce type est suffisamment égoïste pour s’imaginer que ce sont ces 4 enfants qui l’empêchent d’écrire, de vivre, de se réaliser, alors que ce ne sont que des prétextes qui servent à masquer ses propres limites d’homme et d’écrivain. Ils reprochent beaucoup de choses à ses adolescents mais oublie qu’ils l’on eu lui comme modèle toute leur vie ! Il est injuste avec eux, injuste avec sa femme qui a tout quitté pour lui et s’entiche d’un chien envahissant pour combler le vide abyssal de sa propre vie. Accessoirement, il se sert du caractère du chien pour régler des comptes et même intimider les autres, ce qui n’est pas très glorieux non plus. Attal arrive à rendre sympathique un personnage qui ne l’est pas du tout, quand on prend un peu de recul. Mettre en scène le cynisme, c’est difficile car c’est prendre le risque de laisser pas mal de spectateur en route. Yvan Attal reussi en partie, mais en parti seulement, son pari. On sort de la salle en ayant l’impression d’avoir vu un film drôle et sympathique, mais il est difficile d’en tirer quelque chose sur le long terme : quel est message sous-jacent du scénario, quelle est l’idée directrice du film ? Plus j’y repense et plus j’ai l’impression d’un film inabouti et une peu creux, qui voudrait dire quelque chose mais qui, à l’instar de son personnage principal, n’arrive pas à l’exprimer clairement. Du coup, mon impression est un peu mitigée : j’ai vu un film agréable, bien interprété et assez drôle, mais est-ce que j’ai vu un bon film ? Franchement, je n’en suis pas certaine…