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    « Peu m'importe si l'Histoire nous considère comme des barbares »
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    Yves G.
    Yves G.

    1 448 abonnés 3 469 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 20 février 2019
    Mariani Marin (Iacob Ioana) est metteur en scène de théâtre. Elle travaille à la reconstitution du massacre des Juifs commis en 1941 à Odessa par les troupes roumaines pro-fascistes du général Antonescu.
    Ses journées sont bien chargées. Elle doit se documenter sur les événements qu'elle entend relater. Elle doit gérer une vie personnelle compliquée, avec un homme marié dont elle craint d'attendre un enfant. Elle doit recruter des figurants, choisir leur costumes, leur faire répéter des combats soigneusement chronométrés. Elle doit surtout convaincre Movila, un fonctionnaire municipal qui craint que le public n'apprécie pas qu'on exhume les pages sombres du passé national.
    Vient le jour du spectacle...

    "Peu m'importe..." est un film difficile. Son titre interminable, son affiche minimaliste, sa durée hors norme annoncent la couleur : on n'est pas là pour s'amuser. Il évoque une page sombre et méconnue de l'histoire européenne : ces quelques années où la Roumanie, vaincue par Hitler, s'allie avec l'Allemagne nazie sous l'autorité du maréchal Ion Antonescu, un "Pétain roumain" et se rend coupable durant l'opération Barbarossa, sur le front de l'Est, de crimes de guerres et de génocide comme à Odessa en octobre 1941.

    Radu Jude aurait pu choisir la voie du documentaire pour raconter cette histoire. Il choisit un procédé autrement plus malin. Il imagine un double autobiographique, une jeune metteur en scène de théâtre, qui reconstituerait les faits dans la Roumanie contemporaine. Il fait ainsi d'une pierre deux coups : dévoiler un pan honteux de l'histoire roumaine et dénoncer le nationalisme de ses contemporains.

    Car, comme on pouvait le craindre, la reconstitution théâtrale ne se passe pas comme prévue. Nationaliste et anticommuniste, le public applaudit à tout rompre les troupes fascistes d'Antonescu et applaudit à leurs assauts victorieux contre les lignes bolcheviques. Viscéralement antisémite, il ne moufte pas aux exactions commises par les Juifs. Pire : il ceinture un Juif échappé et le renvoie à la mort.

    On l'aura compris : la charge est lourde. Et c'est miracle que le film ne soit pas censuré en Roumanie voire qu'il ait été retenu pour représenter le pays aux Oscars du meilleur film en langue étrangère.

    Voulant tout à la fois exhumer les pages sombres de l'histoire de son pays et dénoncer le négationnisme qui le ronge, Radu Jude filme à la truelle. Il n'hésite pas à asséner des dialogues assommants où l'héroïne s'épuise à combattre ses contradicteurs, les figurants qui paradent en uniforme nazi, les politiciens qui dénigrent son projet. Sans doute l'énergie qu'il déploie est-il à la mesure des mensonges qu'il veut dénoncer. Mais, aussi salvatrice soit-elle, la charge est rude. Après deux heures, on en sort hébété.
    Hotinhere
    Hotinhere

    545 abonnés 4 943 critiques Suivre son activité

    2,0
    Publiée le 2 mai 2021
    Pour rappeler la collaboration de son pays dans la Shoa, une jeune roumaine met en scène un spectacle qui fait polémique.
    Un film engagé qui traque les refoulements de l’histoire officielle mais qui s’égare dans un excès didactique à en devenir lassant.
    traversay1
    traversay1

    3 538 abonnés 4 821 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 24 février 2019
    Radu Jude est un réalisateur assez atypique dans le paysage cinématographique roumain. Engagé politiquement, passionné par l'histoire troublé de son pays, documentariste, metteur en scène de théâtre, également (Scènes de la vie conjugale de Bergman). Bouillonnant et cahoteux, Peu m'importe si l'histoire nous considère comme des barbares revient sur un fait peu ou prou oublié : le massacre de 20 000 juifs par l'armée roumaine en 1941, à travers les préparatifs d'un spectacle vivant. Drôle de film, pédagogique et parfois moraliste, qui dresse aussi un portrait peu amène de la Roumanie d'aujourd'hui, désireuse d'oublier cet épisode peu flatteur de son passé. Il y a à la fois de la subtilité dans son architecture narrative et un côté offensif très marqué qui n'épargne pas la volonté d'amnésie généralisée du pays, proche du négationnisme. En même temps, Radu Jude use de l'humour noir dans ce tableau souvent outré où le peuple est montré comme manipulé et pas loin d'être affreux, sale et méchant. Il y à boire et à manger dans ce film hirsute et peu conventionnel, poil à gratter d'une société qui a accepté l'histoire officielle et qui préférerait que l'on s'attaque aux exactions de la période communiste. La posture de victime est plus confortable que celle de bourreau rappelle en substance le cinéaste dans ce film qui aurait gagné cependant à mettre un peu d'ordre dans le grand foutoir qu'il apparait être parfois et dans lequel se meut avec aisance l'excellente et impétueuse actrice Ioana Jacob.
    Cinéphiles 44
    Cinéphiles 44

    1 350 abonnés 4 139 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 31 mars 2019
    Une artiste met en scène un spectacle sur le massacre des Juifs d’Odessa qui s’est produit en 1941 durant la Seconde Guerre Mondiale. Pendant 2h20, le réalisateur d’« Aferim » utilise le burlesque pour dénoncer le manque d’empathie de ses compatriotes pour cette tragédie. Pour l’histoire, l’armée Roumaine était l’alliée de l’Allemagne nazie avant de la combattre. En 1941, l’anti-juif politique roumain Mihai Antonescu ordonna le massacre de vingt mille Juifs à Odessa. Le spectacle ne semble choquer personne, bien au contraire. Les spectateurs applaudissent les soldats alors que l’inverse aurait été normal. Entre images glaçantes et longues discussions pour savoir qui à tort ou raison, « Peu m'importe si l'Histoire nous considère comme des barbares », phrase extraite d’un discours du maréchal Antonescu en juin 1941, est une parodie pessimiste qui ouvre les yeux sur un passé inconfortable de la Roumanie.
    D'autres critiques sur notre page Facebook : Cinéphiles 44 et notre site cinephiles44.com
    TTNOUGAT
    TTNOUGAT

    584 abonnés 2 530 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 20 mars 2019
    La phrase qui tient lieu de titre aurait été prononcée par Ion Antonescu dictateur roumain qui fut fusillé en 1946 pour crimes de guerre. Ce film se rapporte complètement aux tragiques évènements qui ont conduit en 1941 au massacre de dizaines de milliers de juifs roumains. Il faut nécessairement étudier cette période historique pour bien comprendre le scénario complexe mis en scène par Jude dans le but de raviver les mémoires. Le procédé est intelligent mais beaucoup trop complexe pour en tirer un spectacle pouvant plaire au grand public…C’est un film qui demande une deuxième vision, beaucoup trop de problèmes différents sont abordés et l’idée directrice du ‘’négationnisme’’ est noyée dans un brouhaha visuel et des dialogues lourds. C’est à mon gout bien trop théâtral et le personnage opposé à Mariana est pesant par ses remarques qui partent dans tous les sens. Ce film est épuisant. Deux satisfactions cependant : l’accent mis sur un épisode de la Shoa indispensable à connaître et la personnalité brillante de Ioana Iacob qui donne sa force à l’ensemble. Un plan incongru par son réalisme, excessif en la circonstance, apparaît dans cette histoire allégorique au possible : l’image des deux amants dénudés dans une position de repos. Film qu’il faudrait que chacun voit mais qui hélas n’a pas atteint les 30.000
    entrées en France.
    Jmartine
    Jmartine

    167 abonnés 670 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 24 février 2019
    Après avoir évoqué dans Aferim, l’esclavage des Roms au XIX iem siècle, où dans une espèce de western des Balkans , on voyait un policier et son fils parcourir la campagne roumaine à la recherche d’un esclave gitan accusé d’avoir séduit la femme du seigneur local… Chemin faisant, le père faisait l’éducation du fils à grand renfort d’aphorismes, de lieux communs et de proverbes, tous fortement teintés de racisme, de misogynie, de xénophobie, spoiler: l
    e tsigane est un corbeau, mais le summum dans la bouche d’un prêtre orthodoxe rencontré en chemin est le juif, rangé au rang des sous-hommes spoiler:
    ….dans son nouveau film, Radu Jude se penche sur une histoire plus récente et occultée celle du massacre des juifs d’Odessa par l’armée roumaine. Ces massacres sont parmi les plus importants de la Seconde guerre mondiale après ceux des camps d’extermination nazis, plus de vingt mille civils trouveront la mort entre le 22 octobre et le premier novembre 1941. Ils sont suivis par l'extermination dans les camps du Yédisan d'environ 115 000 Juifs et 15 000 Roms déportés de toute la Roumanie…La Roumanie est alors dirigée par le maréchal Antonescu, dictateur d’une Roumanie fasciste, allié de l’Allemagne nazie entre 1941 et 1944… Le 22 octobre 1941, six jours après l'entrée des troupes roumaines à Odessa, les partisans soviétiques font exploser le quartier général roumain de la ville. L'explosion tue le général Ion Glogojanu, commandant d'Odessa, 16 officiers, 46 sous-officiers et soldats roumains ainsi que 4 officiers de marine allemands. Les soldats roumains ayant échoué dans la capture des véritables auteurs de l'attentat, cachés dans les catacombes de la ville, le maréchal Antonescu ordonnera des représailles implacables contre la population civile, en particulier contre les Juifs, prétendant, conformément à sa propagande, que tous les juifs sont communistes.
    Aussitôt, le nouveau commandant d'Odessa, le général Trestioreanu annonce qu'il va prendre des mesures pour pendre les juifs et les communistes sur les places publiques. Durant la nuit, 5 000 Juifs sont exécutés, pendus en groupes de 3 à 5 victimes à chaque lampadaire le long des boulevards d'Odessa. Le 23 octobre, 19 000 Juifs sont exécutés et leurs cadavres arrosés d'essence et brûlés.
    Le maréchal Antonescu aura cette phrase « «Peu m’importe si l’Histoire nous considère comme des barbares » titre du film de Radu Jude...Il n’y a pas à Bucarest de lieu de mémoire de la Shoah, il n’y a que ce musée militaire national plutôt délabré pour témoigner d’une histoire officielle. C’est ce décor que la jeune metteuse en scène Mariana Marin ( ravissante Ioana Iacob) investit pour répéter avec une bande de figurants indisciplinés un spectacle consacré au sort des juifs pris en tenaille entre les armées allemandes, roumaines et soviétiques…dans un joyeux charivari où chacun a son mot à dire sur ce qui convient ou pas à la mise en scène.. et déjà on entend chez de vieux figurants des propos négationnistes…cette première partie est un peu longue et le film démarre vraiment quand le responsable municipal des affaires culturelles, Movilà, conseille à Mariana de plutôt s’intéresser aux crimes du communisme, mais Mariana ne veut pas faire des roumains des victimes, car c’est en bourreaux qu’elle veut les présenter…Et ces deux personnages s’affrontent dans un débat philosophique convoquant Wittgenstein ou Hannah Arendt qui considérait la Roumanie comme le pays le plus antisémite en Europe, le représentant de la municipalité lui jetant d’autres massacres, africains ceux là, les Hereros de Namibie …dialogue cyniquement érudit par lequel il veille à ce que Mariana n’aille pas trop loin dans la représentation des pogroms et des tueries…sans manquer de souligner que c’est lui qui tient les cordons de la bourse…Au fur et à mesure des répétitions, à mesure que les obstacles se dressent sur sa route, Mariana se durcit dans une posture de plus en plus messianique « je me battrai jusqu’à la mort pour cela » Le spectacle finit par se dérouler sans vraiment impressionner le public qui au contraire applaudit ses soldats et suscite des réactions plus qu’ambigües. Mariana qui voulait faire ressurgir la vérité dans un spectacle qui se voulait cathartique est félicitée pour ses « petites insolences artistiques » Auparavant on aura pu écouter le discours d’une adjointe au maire qui rappelle également que l’antisémitisme roumain est bien plus atavique que circonstanciel, s’insinue dans les propos d’éminents scientifiques comme le découvreur de l’insuline, Nicolae Paulescu, d’éminents représentants ecclésiastiques tels que le Patriarche de la Sainte Eglise orthodoxe roumaine, Miron Cristea. Ce film fort et prenant laisse peu d’espoir sur la possibilité d’un pays de partager une histoire commune et de regarder en face les zones d’ombre du passé ...Dommage que ce film ne soit présenté que dans deux cinémas sur Paris.
    QuelquesFilms.fr
    QuelquesFilms.fr

    267 abonnés 1 634 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 21 mars 2019
    Une jeune metteuse en scène roumaine entend intégrer dans un projet de spectacle historique populaire un épisode relatant les exactions menées par son pays contre les Juifs durant la Seconde Guerre mondiale. Une volonté mal perçue par certains acteurs et par le représentant des pouvoirs publics chargé de superviser le projet... Intelligent dispositif de mise en abyme et de réflexion sur l'histoire et ses représentations, sur ce que l'on peut en faire idéologiquement, politiquement, artistiquement, sur les refoulements et les manipulations, sur l'éducation et les convictions (les "leçons" de l'histoire), sur le passé et les relents contemporains... C'est brillamment écrit, très intéressant, même si certaines scènes (sur la vie perso de la metteuse en scène) ne sont pas forcément utiles.
    In Ciné Veritas
    In Ciné Veritas

    89 abonnés 922 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 20 février 2019
    Dans « Peu m’importe si l’histoire nous considère comme des barbares », Radu Jude remet en scène une tragédie méconnue consciencieusement laissée dans l’oubli. Là où les archives et les témoignages sont rares, une reconstitution en place publique pourrait être un bon véhicule de communication et d’information. Ni fiction, ni film historique, la dernière réalisation en date du cinéaste-documentariste roumain complète une filmographie qui ne cesse de prendre l’ampleur d’une œuvre historique indispensable. Critique complète sur incineveritasblog.wordpress.com
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