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    Waves
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    Jorik V
    Jorik V

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    4,5
    Publiée le 7 décembre 2019
    On sort de la projection les yeux mouillés. Submergé. Par un arc-en-ciel d’émotions. Par un arc-en-ciel de réflexions. Par un arc-en-ciel de sensations. « Waves » fait partie de ces films qu’on n’attend pas forcément mais qui vous marquent profondément, qui vous touchent en plein cœur. Ces films qui vous caressent comme une douce lumière d’été durant un instant et vous glacent le sang celui d’après. Ces films que l’on aimerait garder rien que pour soi tant ils sont uniques et particuliers. Ces films qui réveillent un florilège de choses en nous, des sentiments parfois endormis. Ces films qui touchent à l’universel parce qu’ils convoquent tout ce qui fait que la vie est belle, mais parfois horrible aussi. Ces films qui vous envoûtent dès les premières minutes et vous absorbent la rétine pour ne plus vous lâcher. « Waves » c’est tout ça et bien plus encore. Difficile à résumer alors que son histoire est d’une simplicité qui confine à l’ascétisme. Pourtant, il nous passionne plus de deux heures par sa beauté formelle et les émotions intenses qu’il procure. D’ailleurs, le long-métrage s’ouvre sur un rayon de soleil, symbole du prisme des couleurs de l’arc-en-ciel, et se referme sur sensiblement la même image. Entre temps, on aura justement traversé tout le prisme des images et des couleurs dans notre cœur, dans notre esprit et au plaisir de nos yeux. En passant par tout un panel d’émotions en tous genres.



    Le cheminement et le message en filigrane sont simples et beaux. Et par un habile tour de passe-passe de scénario, un revirement de script très risqué qui voit le film changer de personnage principal en cours de route, « Waves » nous montre que tout ce que la vie peut nous offrir de belles choses, elle peut le reprendre en un instant, que tout ne tient qu’à un fil. Que le bonheur peut voler en éclat à n’importe quel moment. Mais également que du pire des malheur peut renaître le bonheur à nouveau. Ce sublime long-métrage nous parle tout simplement de la vie dans ce qu’elle peut avoir de plus classique, dans toute sa simplicité et sa complexité. Il suit narrativement une courbe émotionnelle basique mais intelligente qui couve une note d’intention positive puisqu’elle nous amène de l’expression du bonheur le plus simple à un cauchemar réaliste pour remonter vers l’apaisement et la lumière retrouvés. Le trauma central au milieu du film est aussi puissant, réaliste et éprouvant que pouvaient l’être, par exemple, ceux de « Requiem for a dream » ou « Irréversible ». En néanmoins bien plus terre-à-terre, trivial dira-t-on, et surtout l’aspect sensationnel en moins. Alors que durant les vingt premières minutes, le réalisateur nous fait une synthèse parfaite et évanescente de la réussite à l’américaine, le drame qui va se nouer petit à petit montre qu’en un instant tout peut voler en éclats. Mais par la force de sa mise en scène, de son script et d’un changement inattendu de point de vue, il conclut son film avec la plus belle des notes d’espoir. C’est beau à en pleurer et difficile à plusieurs instants de contenir ses larmes devant la charge émotionnelle de certaines scènes où des acteurs en tous points parfaits rivalisent de vérité dans leur jeu et de justesse pour nous étreindre le cœur. Que ce soit une sœur qui vient en aide à un frère qui va mal, un père sévère et désemparé qui décide de se confier à sa fille ou encore un adolescent qui pardonne à son père malade, « Waves » entrechoque les destins et les moments déchirants sans jamais forcer le trait mais en nous touchant toujours droit au cœur. C’est fort, c’est beau et ça sonne vrai.



    Au-delà des émotions et réflexions profondes qu’elle procure, cette œuvre à la fois dure et douce nous met KO par la beauté de ses images. Dès le début où la caméra tourbillonne autour de son personnage principal enchaînant les séquences anodines pour en dresser le portrait, on est captivé par la magnificence de ses plans. C’est seulement le second long-métrage de Trey Edward Shults après le très remarqué et réussi film d’horreur indépendant « It comes at night », déjà visuellement très pertinent et impressionnant. Il réussit ici peut-être la plus belle mise en scène de l’année. Esthétique sans être prétentieuse ou tape-à-l’œil, elle convoque donc les couleurs de l’arc-en-ciel, des plus sombres aux plus lumineuses selon la tonalité des scènes. Le cinéaste ose aussi rétrécir l’écran en largeur ou en longueur pour coller avec ce qui se passe à l’écran, de manière discrète mais probante et en adéquation avec le propos. Il maîtrise des séquences éthérées à la « Virgin Suicides » ou d’autres tellement envoûtantes que Terence Malick lui-même pourrait les lui envier. Tout en les signant de sa patte personnelle, sans singer personne. Il réussit même à faire la synthèse, que dis-je le grand écart, entre l’imagerie de l’univers du clip (aidé par le fait que le film se situe à Miami) et celle du cinéma indépendant américain typique. Un bel ouvrage, un ouvrage d’orfèvre qui participe à la réussite d’un film qui approche le chef-d’œuvre. Ou quand la maestria visuelle se marie à la perfection du propos pour un film juste, fort, jamais prétentieux et tout simplement inoubliable. « Waves » est une chronique de la vie, une tranche de vie(s) qui sera une des perles, si ce n’est la perle de cette année cinéma. De la trempe de « Moonlight » en bien plus fort encore. A ne manquer sous aucun prétexte.


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