Évoquer le destin d'une des premières syndicalistes françaises ? Beau projet, logiquement mené par un Gérard Mordillat toujours aussi sensible à la cause des « travailleurs ». Malheureusement, on devine rapidement que les intentions plus qu'honorables ne vont pas suffire. Le réalisateur fait des choix étranges, lourdauds (l'identité des principales protagonistes apparaissant l'une après l'autre avec leur statut familial), donnant à son œuvre un aspect très empesé, presque artificiel. Autant je trouve qu'il ne s'en sort pas trop mal niveau reconstitution au vu des moyens très limités, autant niveau lyrisme, émotions, surtout au vu du sujet, le téléfilm est en souffrance, figé, sa dimension trop souvent scolaire et sa linéarité jouant grandement. On a beau apprendre certaines choses, on n'est pas vraiment surpris par les événements, notamment quant à la houleuse relation entre les ouvrières et les patrons, d'autant que cette dernière a tendance à virer aux stéréotypes caricaturaux : OK, cela devait se passer un peu comme ça à l'époque, mais il y avait sans doute des manières plus habiles de le montrer. Même constat pour Virginie Ledoyen (bien plus belle que la Lucie Baud originelle, en passant!) : elle a une jolie présence, un beau sourire, mais son interprétation manque de puissance, d'intensité, son visage restant souvent impassible et sa diction presque monotone. Heureusement, et même si le cinéma français semble l'avoir oublier ces dernières années, Philippe Torreton est un acteur brillant, pour le coup vraiment à la hauteur de la lutte menée ici, certains seconds rôles (en premier lieu le très bon Marc Barbé) faisant également bonne figure. Enfin, il faut écrire qu'une fois que nous sommes au cœur des enjeux, « Mélancolie ouvrière » se suit avec un peu plus d'intérêt, la période et le discours étant suffisamment importants pour qu'on les suive avec un certain d'intérêt. Au moins en sort-on un peu plus érudit que 90 minutes avant, mais cela reste un peu court, à l'image d'un dénouement frôlant le ridicule : Lucie Baud méritait mieux.