Fiston Blier emmène son père et ses potes au théâtre, et à voir leurs têtes renfrognées, ça ne les fait pas énormément rire. Bien-sûr, c’est une ruse. Maniant nonsenses et rictus acides, l’héritier dresse une galerie foutraque de dégénérés, assassin somnambule et veuve noire nymphomane, serial-killer de comptoir, pervers suicidaire et flic qui a raté sa voie. Buffet froid, c’est une brochette de cinglés qui rissole dans une sauce de surréalisme ; un court assemblage de sordide, de léger, de baroque et d’odieux, une farce insolente qu’on ne sait pour tout dire pas vraiment comment prendre. Par-dessus la jambe, sans doute, puisque c’est là semble-t-il la morale de cette charge amorale. Une tranche de steak, un verre de vin, et voilà nos sinistres drilles qui échangent leurs souvenirs et leurs projets de meurtres, enchainent sur une discussion creuse et se tiennent prêts pour une nouvelle absurdité. On croirait y lire le gêne Ionesco, mais non, c’est bien nos Depardieu, Carmet, Serrault qui prêtent main forte à la famille du cinéaste. N’empêche, ce ton est nettement déstabilisant, et c’est peu dire que le fou qui montrait ses Valseuses en laissera encore sur le bas-côté. Surtout, n’est pas Audiard qui veut, et le manque de sel des dialogues, malgré leur insistance à forcer sur la truculence, finit par étouffer le chrétien (ou le juif, le musulman, le bouddhiste ou l’athée, mais le jeu de mot aurait raté). Bref, il patiente, dans l’espoir d’un dessert en apothéose ; mais la récompense ne vient pas. Alors il repart, un peu déçu.