« Sorry We Missed You » est un tableau particulièrement réaliste, difficile et inquiétant de ce que nous promettent nos politiques ultra libérales d’aujourd’hui !
Voilà tout à fait à Newcastle en Angleterre, l’exemple de ce que la casse d’un modèle social absolument indispensable au bien être de tous, va produire maintenant et ailleurs dans bon nombre de familles, en amenant ainsi la plupart d’entre nous à aller droit dans le mur...
Ken Loach n’y va pas par quatre chemins, et la façon dont il enroule ou déroule sa spirale infernale pour démontrer ce fléau, n’a pourtant ici rien d’exagéré, ni d’outrancier.
C’est tout simplement la vie d’une famille courageuse dans la galère, où tout est tellement précaire et sur le fil, que quelques pépins du quotidien mis bout à bout, vont déclencher sa descente aux enfers !
C’est pourtant l’espoir d’un nouveau boulot de livreur pour Ricky, qui évoque évidemment le système et les dangers de l’ubérisation, avec l’achat d’un camion et un statut d’auto entrepreneur à la clé, et donc tout le danger et les retombées attendues, qui vont être sur la sellette !
Horaires sans limites, fatigue, rendement et pression à tous niveaux, remboursement d’un prêt de véhicule, ce qui va, on s’en doute, engendrer parmi ces parents pourtant amoureux, aimants et unis autour de leurs deux enfants, un véritable bouleversement de vie, voire un séisme dans leur équilibre déjà fragilisé par cet ado Seb sur la tangente, et cette maman Abby protectrice, épuisée, harassée par son travail social pénible et aucunement considéré !
Chaque petit imprévu, la moindre contrainte ou réunion, seront pour eux une montagne à surmonter, quand ce ne sera pas tout simplement les conséquences de la fatigue, ou les dangers de la rue...
Une cascade d’événements tellement évidente et dramatique pour ces quatre individus qu’elle nous glace les sangs, nous révolte au plus profond de nous mêmes, en révélant à nos yeux un monde de misère destiné à ceux que nos gouvernants appellent « ceux qui ne sont rien », un monde où donner quelques miettes de plus est déjà trop !
De voir ces comédiens tout frais moulus endosser pour la première fois ces rôles poignants et admirables nous remue comme jamais, jusqu’à la petite Liza (Katie Proctor), bouleversante de bienveillance envers les siens qu’elle aimerait tant voir heureux et soudés.
Quel jeu, quel désarroi tellement palpable qu’on le ressent en plein cœur, tel un coup qui fait mal, mais qui fait peur aussi quand on pense que cette réalité a l’écran est bien celle que vivent un nombre grandissant, et même galopant d’individus dans un monde capitaliste qui ne sait que broyer de l’humain !
Encourager une économie ultra libérale et s’attaquer par conséquent à un système social, de retraite et de santé comme on se prépare à tous connaître, va comme nous le montre courageusement Ken Loach, conduire irrémédiablement à ce genre de société où les pauvres seront de plus en plus nombreux, au delà même des problèmes liés au type de consommation que nous proposent ces grands trusts, d’ailleurs également dénoncé indirectement dans ce film !
Une grande claque que ce cinéaste audacieux et essentiel enfin nous donne encore, avec ce témoignage criant de vérité auquel il faut tous réfléchir et vite réagir, car tous ensemble nous en avons les moyens !
Bravo et encore bravo à Ken Loach, celui qui croit en l’homme en lui rendant un bel hommage, celui qui nous alerte et réveille nos consciences, avant qu’il ne soit trop tard !