« Furie » résonne étonnement fort après l’affaire de Théoule-sur-Mer en août dernier. En lisant ce fait divers, j’étais remonté, je n’admettais pas l’idée que des propriétaires pouvaient être « destitués » un temps de leur acquisition immobilière au dépens de squatteurs. Et ce qui me révoltait par-dessus tout, d’une part, c’est qu’une membre du gouvernement ait déclaré que « la loi était bien faite, inutile de revenir là-dessus » et d’autre part, que la police ne pouvait rien faire !!! Se faire justice soi-même était évidemment déconseillée, déloger soi-même un squatteur signifie 3 ans de prison ! L’affaire de Théoule-sur-Mer a été médiatisée et miracle, le gouvernement a décidé de revoir la loi avec l’amendement Kasbarian. Ainsi, Emmanuelle Wargon, ministre en charge du logement parvient à l’unanimité à adopter l’amendement qui facilite l’expulsion des squatteurs. A tous les sceptiques qui pensent que "Furie" est gros comme une maison doivent finir par prendre conscience que la mèche qui a permis à allumer le scénario de « Furie » est malheureusement très réaliste ! Au moment où j’écris ces lignes, d’autres affaires de ce genre se perpétuent notamment dans la Nièvre. Avec cet amendement mis au vote ce 30 septembre, le propriétaire après avoir déposé plainte récupérera son bien dans les 48 heures après intervention du préfet. L’origine du mot « cambrioler » signifie « dévaliser la chambre, d’autres l’interprètent par « violer la chambre ». Se faire cambrioler est traumatisant. C’est violer son intimité. Alors, squatter, c’est violer avec séquestration ! Comment ne pas se sentir souillé. Je comprends les propriétaires de Théoule-sur-Mer qui ont jeté tous leurs meubles, soit deux bennes d'encombrants ! J’ignorai cette loi révoltante qui favorisait les squatteurs, c’est-à-dire des hors-la-loi ! C’était une vision d’horreur. Et là, coïncidence, je rencontre « Furie » d’Olivier Abbou. Parti de ce fait divers inadmissible, il en fait un film d’horreur. Ou plutôt, « Furie » emprunte les codes du film d’horreur. Au-delà de cette loi insupportable, Olivier Abbou aborde la violence que cette loi injuste peut générer en nous-même. Paul en l’occurence (Adama Niane) n’arrive pas à terme à accepter l’inacceptable. Lui qui a coché toutes les cases du bon citoyen. Il se soumet à la loi mais celle-ci ne lui sourit pas dans l’immédiat. Il doit se heurter à tout un parcours administratif qui ne l’entend pas. Paul ne supporte pas l’attente et les prolongations. Cette loi absurde l’obsède et encombre son esprit. Olivier Abbou a eu la bonne idée de ne pas faire de Paul un homme baraqué, un badass comme on dirait, son gabarit n’impressionne pas et il ne semble pas nourrit aux arts martiaux. C’est un homme passe-partout. Son impuissance à agir parce que muselé par la loi, parce que citoyen honnête, n’empêche pas la violence enfouie au plus profond de lui à monter graduellement. Toutes réflexions contribuent à nourrir cette violence ; référence à une sucrerie : noir dehors, blanc dedans ; et sa fréquentation avec la bande à Mickey. La présence de Mickey et de sa bande (faussement) sensible n’est pas une facilité de scénario pour justifier la violence. Je regrette, mais la violence de « Furie » n’est en aucun cas gratuite. En revenant sur l’affaire de Théoule-sur-Mer, comme par hasard, le Rassemblement National s’est emparé de l’affaire en lançant une pétition. Je n’irai pas jusqu’à dire que Mickey et sa bande sont la traduction du mouvement Le Pen, mais qu’on le veuille ou non, Mickey et sa bande traduit une démarche populiste. Le raccourci est rapide ou démagogique, il reste que cette loi absurde abreuve les milieux populistes et Paul fragilisé par cette situation trouve un interlocuteur qui l'entend contrairement à l'administration. Voilà pourquoi la présence de Mickey et sa bande n’est pas une facilité de scénario. Paul illustre sans doute la nature humaine lambda, celle qui se range, qui marche sur les clous même si de temps en temps coupable de petits péchés sans conséquence, celle qui ignore que la violence peut la défigurer parce que victime d’une société dont une des lois ne lui est pas reconnaissante. « Furie » est un thriller qui se meut peu à peu en horreur. D’autant plus que cette horreur s’ancre dans la réalité. D'aucuns s'offusquent des scènes finales, ne pas oublier que c’est avant tout un film. Toutefois, en fouillant bien, les faits divers sordides pullulent. Un film efficace, bien interprété et vraiment terrifiant.