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velocio
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3,5
Publiée le 9 février 2022
C’est en 2015 qu’a éclatée ce qu’on a appelé « L’affaire François Thierry« , du nom du patron de l’Ocrtis, Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants, soupçonné d’avoir favorisé l’importation de quantités importantes de cannabis et d’être en lien avec Sofiane Hambli, un des plus importants trafiquants de drogue en Europe. Au départ, l’interception par les Douanes de trois camionnettes garées Boulevard Exelmans, dans le 16ème arrondissement de Paris, et dans lesquelles on trouve 7 tonnes de cannabis et la mention du nom de Sofiane Hambli. En parallèle, pris de doute sur le bien-fondé des actions auxquelles il participait, Hubert Avoine, un homme employé par l’Ocrtis pour différentes missions d’infiltration après avoir été infiltré dans les cartels mexicains pour le compte de l’agence antidrogue américaine, s’est mis à dénoncer les méthodes de François Thierry à la justice ainsi qu’à un journaliste de Libération, Emmanuel Fansten. En mars 2017, « L’infiltré », un livre écrit par Hubert Avoine et Emmanuel Fansten est sorti en librairie. Quelques mois plus tard, un cancer a emporté Hubert Avoine.
C’est de ce livre que Thierry de Peretti, qui, jusqu’ici, avait réalisé ses films en Corse, s’est librement inspiré pour "Enquête sur un scandale d’état". Librement mais avec toutefois beaucoup de points communs entre la fiction et la réalité des faits ! Les noms des personnages ne font pas partie des points communs : ils ont tous été changés ! François Thierry est devenu Jacques Billard, interprété par Vincent Lindon, Hubert Avoine est devenu Hubert Antoine, interprété par Roschdy Zem et Emmanuel Fansten apparait sous le nom de Stéphane Vilner, interprété par Pio Marmaï. Par ailleurs, le réalisateur a choisi de laisser planer le doute sur ce qui est, finalement, le fond de l’affaire : Hubert Antoine, l’infiltré qui « crache le morceau », dit-il le vrai lorsqu’il parle des méthodes de Jacques Billard, auquel cas on peut en effet parler d’un scandale d’état, ou bien n’est-il qu’un affabulateur ? En plus, si Hubert Antoine est un affabulateur, quelle est la part de vérité, quelle est la part de mensonge dans ce qu’il raconte ? Jacques Billard ne s’efforce-t-il pas sincèrement de combattre le marché de la drogue avec, certes, des méthodes contestables mais, peut-être, efficaces ? Se pose alors la question : jusqu’où peut-on aller dans l’illégalité pour combattre l’illégalité ? Cette chape grise posée sur l’histoire par le réalisateur rend parfois délicate la compréhension du film mais le rend incontestablement passionnant à suivre.
Ce film, réalisé par Thierry de Peretti que j'ai pu découvrir en avant-première, n'est pas mal mais sans plus ! Le film est inspiré de faits réels et relate une affaire opposant un journaliste de Libération accusant un haut gradé de la police française de diriger un trafic d'État. Ce film est donc un thriller mais il est avant tout politique et surtout bavard, ce n'est donc pas un thriller vraiment haletant, le film prenant plutôt la forme d'un documentaire. Enfin, le film reste une fiction bien-sûr mais son format 4/3 et ses longues scènes dialoguées en plans-séquence nous font plus ici penser à un documentaire. Le film tend ainsi vers une certaine authenticité mais également quelque-chose d'assez froid et brut qui peut, par ailleurs, être très déconcertant au début. Ces longs plans-séquence, bien que très bien mis en scène (et on notera également le professionnalisme des acteurs capables d'enchainer de très longs monologues), sont parfois un peu longuets car ils sont, comme je l'ai précisé plus haut, très bavards. Et ainsi, si on s'attend à un thriller haletant, et bien c'est un peu raté car nous avons surtout devant les yeux une intrigue qui passe énormément par les dialogues. Alors, il faut aussi bien suivre cette intrigue pour ne pas en perdre le fil, il m'est arrivé par exemple de décrocher à plusieurs reprises et il est par la suite très difficile de rentrer à nouveau dans le film, tellement ce dernier nous balance des informations à la minute. Il faut également du temps avant de s'adapter au jargon journalistique et politique (enfin, du moins, celui de la brigade des stups) et de comprendre les enjeux et les relations de chaque personnage. Mais, malgré ces difficultés, le film est également très intéressant car il questionne constamment son spectateur ; c'est-à-dire que finalement, on ne sait jamais vraiment si le journaliste se fait mener en bateau ou s'il y a effectivement une vraie histoire de trafic derrière. Concernant les acteurs, nous retiendrons principalement Pio Marmaï, Roschdy Zem et Vincent Lindon qui jouent très bien ! "Enquête sur un scandale d'état" peine donc quelques fois à captiver son spectateur sur la durée mais n'en est pas inintéressant pour autant !
En plaisantant, Thierry de Peretti indique que Enquête sur un scandale d’État est son premier film "français" après deux longs-métrages consacrés à sa Corse natale. Il n'y a cependant pas de dépaysement dans la manière du cinéaste, qui refuse le spectaculaire et préfère les conversations (malheureusement pas toujours faciles à entendre, pour cause de bruits de fond ou d’enchevêtrements de paroles) pour nous immerger dans un faux thriller en pleines zones grises. Au-delà de ce qui constitue la trame du film, les dérives de l’État dans la lutte anti-drogue, c'est l'alliance entre un journaliste d'investigation et un "employé" des stups, qui agissait comme infiltré, qui intéresse de Peretti. On reconnait la patte du réalisateur dans cette minutie obsessionnelle des détails et un hyperréalisme très documenté. Ce n'est pas que le film soit fastidieux mais il semble tellement obsessionnel quant au traitement de son sujet qu'il n'y a nulle part d'espace pour respirer un peu (et se détendre ?) y compris dans les nombreuses scènes dans une salle de rédaction. On aimerait tenir là une œuvre à la Pakula ou à la Rosi, ce qui est rare dans le cinéma hexagonal, mais de Peretti s'impose à lui-même et aux spectateurs une telle exigence dans son récit qu'il en devient filandreux et parfois même opaque. Trois acteurs se détachent largement du lot : Roschdy Zem, Pio Marmaï et Vincent Lindon, impeccables, dans un film très masculin qui ne s'autorise aucune sortie de route sentimentale ou humoristique.