N'étant pas toujours fan du cinéma d'Arnaud Desplechin, j'avoue avoir hésité avant de tenter ce « Roubaix, une lumière », intrigué par le changement de registre du réalisateur, signant ici son premier « polar ». Et j'avoue qu'au départ, j'étais sous le charme. La ville est très bien filmée, les différentes intrigues s'entremêlent habilement, élégamment, le tout porté par une musique et une lumière d'une délicatesse infinies, nous intéressant d'emblée au quotidien de ces différents personnages. Ce n'est d'ailleurs qu'à la moitié que l'œuvre prendra un virage pour se consacrer quasi-uniquement à une seule affaire criminelle, inspirée de façon très réaliste d'un fait divers assez sordide, intervenu en 2002. Au départ touchante, à la fois empathique et mystérieuse vis-à-vis de la personnalité des deux suspectes, celle-ci finit par devenir de plus en plus pesante, lassante voire limite pénible. C'est qu'au départ, malgré cette dimension authentique, le film restait doté d'un beau sens du romanesque, donnant à ces enquêtes du quotidien une réelle intensité. Là, cette reconstitution point par point, quasiment minute par minute où aucun détail ne nous est épargné sur le déroulement du meurtre, certes on y croit, mais on s'ennuie surtout beaucoup. Pourquoi avoir voulu nous imposer tous ces détails ? Juste pour bien nous montrer comment se déroule une enquête policière du début à la fin ? Sans doute, mais je n'y vois vraiment pas d'intérêt, enlevant pas mal de force à un titre qui, longtemps, avait su faire preuve d'une belle profondeur, que ce soit à travers le personnage (bien) incarné par Roschdy Zem ou ce policier « poète », touchant lui aussi. Bref, ce qui aurait dû être le point fort de l'entreprise finit par devenir son fardeau : s'il ne faut nullement en oublier les belles qualités citées précédemment, le distinguant du tout-venant hexagonal, c'est néanmoins cette impression de frustration qui domine en sortant de la salle, ce qui est, évidemment, pour le moins problématique. De quoi nourrir de sérieux regrets.