Un espion ordinaire
Héros malgré lui
Dominic Cooke a 54 ans et c’est seulement son 1er film qui sort sur les écrans. Il transforme parfaitement son essai de film d’espionnage. Un suspense de 112 minutes sacrément bien mené. 1960. Modeste représentant de commerce anglais, Greville Wynne se retrouve plongé au cœur de la guerre froide. À la demande du MI-6 et de la CIA, il noue une alliance aussi secrète que périlleuse avec le colonel soviétique Oleg Penkovsky. Objectif : fournir les renseignements nécessaires aux Occidentaux pour éviter un affrontement nucléaire et désamorcer la crise des missiles de Cuba. Il entame alors une série d'allers-retours entre Londres et Moscou en prenant de plus en plus de risques… La belle surprise que voilà servie par une superbe distribution juste et très impliquée dans cette histoire plus que sombre. A voir !
Le film s'intéresse à l'histoire vraie d’un homme d'affaires britannique et de sa source russe qui a aidé la CIA à pénétrer le programme nucléaire soviétique durant la Guerre froide, ce qui mit fin à la crise des missiles de Cuba. J’avoue humblement ignorer totalement cet épisode qui a vu s’affronter à distance Kennedy et Khrouchtchev qui ont failli mettre à mal le fragile équilibre du monde à cette époque. On est, ici, loin d’un scénario fuligineux à la John Le Carré, c’est même limpide quoique les arcanes du monde parallèle des services secrets restent parfois impénétrables. Certes, la plus grande partie des faits relatés demeure classée Secret Défense, mais le récit est clair, et les retentissements des risques pris par ces espions, sur leurs propres familles, parfaitement mis en scène. La photo, les décors et les costumes sont parfaits. L'équipe a sillonné l'Europe de l'Est pour dénicher des lieux de tournage plausibles, créant ainsi une atmosphère oppressante qui ajoute beaucoup à la réussite de ce film. Et je tiens à souligner que, pour une fois, les acteurs jouent dans la langue de leur pays, ce qui est, hélas, trop rare dans les films anglo-américains, ce qui amplifie le réalisme de ce suspense d’espionnage.
Après La Taupe et Imitation Game, Benedict Cumberbatch, comme toujours impeccable, devient le spécialiste du film d’espionnage. Sa transformation pour la dernière partie est époustouflante. Face à lui, le formidable acteur géorgien, Merab Ninidze, lui donne une excellente réplique. Citons encore Rachel Brosnahan et Jessie Buckley parfaites elles aussi. Quand on pense que cette histoire reste d'une actualité brûlante, et c'est plutôt terrifiant. Tout petit bémol, les distributeurs français ont cru bon de changer le titre original The Courrier, bien plus adapté que celui choisi pour l’exploitation en France. Un suspense à combustion lente dont les amateurs du genre ne doivent surtout pas se priver.