Voilà un documentaire instructif. J’ignorai tout de cet évènement bien de chez nous ! Mais à bien y réfléchir, combien d’évènements insolites me sont totalement inconnus ? Je ne dois pas être le seul à me poser cette question. Comme je ne dois pas être le seul à avoir été ému. Rares sont les documentaires qui me touchent. Dès les premières images de danses ma gorge s’est serrée à ma grande surprise. Je n’en revenais pas de tout ce monde venu de France, de Navarre et d’Europe réunit pour communier une même passion : la danse. Ce n’est pas un festival de 7 jours et 8 nuit de défouloir, non, ce sont des danses ancrées dans la terre, celles qui font référence à la ruralité, à la tradition des ancêtres, danses de tous les territoires du monde. Danses qui aspirent et inspirent tous les âges ! Les danses du terroir pourraient concerner « des anciens » , non, j’ai été étonnement et agréablement surpris de voir des jeunes filles, des jeunes femmes et des jeunes hommes se mêler à des femmes et à des hommes mûrs, à des hommes et des femmes d’un certain âge ; et, au-delà de la France, concernés, séduits, happés, par ces musiques traditionnelles. La danse, c’est avant tout de la musique laquelle transporte et favorise la danse. La musique, ce sont des instruments et des musiciens. Dit comme ça, c’est enfoncer des portes ouvertes ; ce qui n’est pas le cas pour Laetitia Carton : « Danser, ce sont aussi des instruments, des musiques. Se réapproprier des choses d’hier, des pas, des mélodies, des chants des instruments. L’interaction entre les musiciens et les danseurs. » Et cela se voit sous l’oeil bienveillant et discret de la caméra de Laetitia Carton. Ça compte les pas, ça cherche le rythme, ça s’imprègne de la musique, d’une voix. Tous à l’unisson concentrés, appliqués, libérés, expérimentés, fébriles, assurés dansent d’un même pas, se confondent avec la musique que ce soit en groupe ou par couple. Laetitia Carton : « On tourne, on transpire, on rit, on pleure on compte les pas, on chante, on se sent seul, on virevolte, on lâche, on attend, on s’agace, on joue, on devient fou. Raconter les regards, l’agilité et la simplicité des expérimentés, les lâcher-prise, les libertés que l’on prend, la folie douce, la grande humanité qui défile, la joie qui illumine les visages, les attentes sur les chaises, l’amour qui naît, la fatigue qui tombe, les liens qui resserrent et qui font tenir debout, quand on ose enfin se toucher, quand on se regarde, quand on vit vraiment ensemble et que la vie pulse. « La grande humanité » nous dit dans ce tourbillon de mots la réalisatrice de sa voix chaleureuse. Il y a une séquence où tout un groupe est concerné, concentré, presque en transe, les uns serrés contre les autres, continue ad libitum la chanson, decrescendo, alors que les deux musiciens avaient fini - il me semble -, leur chanson en fondu ; face à cette vague humaine qui ne lâche pas, les musiciens reprennent leurs notes, les dernières, comme pour sortir le groupe de sa torpeur. Cette séquence donnait un sens à "cette grande humanité". Dans ce microcosme qui a ses codes et dont le langage se veut universel, on peut trouver des hommes et des femmes qui restent sur la touche, parce que timides, parce qu’inexpérimentés. Mais tous sont liés, connectés. Un témoin nous dit : « Une connexion qui est liée à l’envie de vivre ». Oui, la danse c’est la vie, c’est un mouvement et le mouvement est la vie. Touchantes sont les interventions butinées ici ou là par la caméra, comme cette jeune femme qui nous dit qu’elle aime changer de partenaires car danser avec le même serait synonyme d’ennui ; une autre qui nous dit qu’un homme l’avait invité à danser mais comme elle ne maîtrisait pas la polka, il s’est retiré ; à sa grande surprise, selon elle, il a mal interprété sa réponse : le danseur a pensé qu’elle ne savait pas danser et non qu’elle voulait danser. Enfin pour conclure, cet autre témoignage d’une femme : « Ce côté éphémère, ça crée une poésie, je trouve ça beau. ». Merci à Laetitia Carton pour ce documentaire en effet poétique et surprenant.