C'est le film le plus noir que j'aie pu voir cette année. Si j'ai bien compris, ce film date de 2016 mais ne sort en France que le 21 novembre 2018. J'ai pu le découvrir lors de la Cinexpérience #126, où Anurag Kashyap, le réalisateur est venu présenter son oeuvre.
Etant totalement inculte niveau cinéma indien, j'ai été content de voir un film qui sort de la tradition bollywoodienne. Grâce à ce film, j'ai appris que Mumbai était le nom actuelde Bombay, et que dans les années 60, un serial killer du nom de Raman Raghav y a sévi (il est soupçonné d'avoir fait plus d'une quarantaine de victimes). Raman Raghav 2.0 est d'ailleurs le titre original du film.
Le réalisateur a expliqué qu'à l'origine, il voulait faire un film sur Raman Raghav, mais reconstituer Bombay dans les années 60 aurait coûter trop cher. Il a donc bifurqué sur un film de serial killer qui aurait été fasciné par son tristement célèbre modèle. La construction du film n'est pas linéaire, le film est découpé en chapitres au gré desquels on voyage dans le temps, ce qui pourrait faire penser à des films de Tarantino ou au Mémento de Nolan. On y suit deux personnages principaux, le tueur en série donc, et un commissaire de police chargé de le traquer. Ce flic, qui est loin d'être un modèle de vertu, a fait penser à certains spectateurs de la Cinexpérience au Bad Lieutenant d'Abel Ferrara ou à celui de Werner Herzog. Pourtant, le réalisateur nous a assuré qu'il n'avait qu'une seule référence en tête en fabriquant son film : le final Se7en.
Et avec cette référence en tête, on saisit bien à quel point ce film est noir de chez noir. Seulement, là où Se7en ressemble à un exercice de style, car l'ami John Doe ne fait que prêcher, s'attardant sur les monstruosités du monde en en occultant les côtés positifs, les personnages de The Mumbai murders ne semblent être là que pour montrer les aspects terrifiants de l'Inde actuelle, marquant ainsi un aspect politique du film. Inceste, corruption, condition de la femme, atavisme, traditions, religions, insécurité... Sans être les sujets centraux du films, ces aspects sont montrés à un moment ou à un autre dans le film, cela ne fait pas une bonne publicité pour l'Inde, même si elle n'a pas l'exclusivité de ces problèmes. Le réalisateur a ainsi précisé qu'il avait dû se battre contre la censure dans son pays pour pouvoir sortir son film dans une version malgré tout édulcorée.
Ce film est très dur, les personnages étant pratiquement tous détestables, mais le réalisateur a eu la bonne idée de saupoudrer son film d'un humour décalé, et surtout il a eu le bon goût de suggérer la violence en faisant en sorte que la plupart des actes les plus abominables se déroulent hors champ.
Les premières minutes peuvent être dures à suivre (beaucoup de lumières stroboscopiques couplées à une musique techno loin des standards des comédies musicales de Bollywood), mais dès le premier meurtre, ça s'arrange.
A déconseiller aux âmes sensibles et aux amoureux de la justice.