Rétrospective mélancolique pleine de grâce, ou les douleurs du passé sont traduits en douleurs physiques de l’homme vieillissant. Bref : un Almodovar assagi et calme.
Ce n’est pas la première fois que Pedro Almodovar base ses films sur sa propre vie. Mais ‘Douleur et Gloire’ semble bien plus intime que les précédentes. Focus sur la petite enfance, les années ‘folles ‘ de Madrid racontés en forme d’un récital de théâtre sur une scène nue, et puis la vie du présent d’un réalisateur en souffrance, sans inspiration ni envie de vivre.
Le metteur en scène est joué par Antonio Banderas, un des acteurs de la ’troupe’ Almodovar. Banderas joue avec délicatesse un portrait sensible et touchant de son réalisateur. C’est probablement une des meilleures performances de sa carrière.
Quand Banderas (dans la peau d’Almodovar) dit à l’acteur qui jouera son rôle que le meilleur comédien s’arrête juste avant de pleurer, le ton est donné. C’est précisément cette douleur qui caractérise cette élégante œuvre autobiographique.
Mais soyez rassuré : On retrouve dans ‘Douleur et Gloire’ toutes les couleurs de l’univers Almodovar, même si ici le bon goût prend la place de l’exubérance de ses premiers films. Vivifiant, classe, élégant, les couleurs et le design, cette ‘peinture’ si typique de ses films, sont présents partout, même quand Almodovar parle de la dépression. Et pour cause : le décor de l’appartement du réalisateur dans le film est la reproduction exacte de l’appartement madrilène d’Almodovar.
Je crains que, une fois de plus, Almodovar n’aura pas la Palme d’Or, ni qu’il y aura foule pour voir ce film intimiste. Mais les afficionados du maître ne seront pas déçu. Il y a tout ce qu’on aime chez Almodovar : une caméra juste, de l’humour, les couleurs caractéristiques de ses décors, et des plans serrés de ses acteurs fétiches (dont Pénélope Cruz, magnifique) qu’il dirige comme personne d’autre.
L’évolution depuis le fougueux ‘Matador’, les folles ‘Femmes au bord de la crise de nerf’, l’exubérante ‘Kika’, ‘Atame’ et ‘Volver’, jusqu’à cette fable intimiste et sensible, décousue et dense à la fois n’est pas sans faire penser à la filmographie de Woody Allen qui va de la comédie au drame, tout en gardant une signature inimitable.
Pedro Almodovar fait partie de ces grands metteurs en scène qu’on a toujours plaisir de retrouver.