Réussir à faire rire ou réussir à toucher, rester dans la légèreté d’un divertissement ou la profondeur d’une œuvre d’art marquante, l’une ou l’autre de ces visions du cinéma ne peuvent être hiérarchisé tant elles apportent tous deux différemment à chacune, mais les combiner en revanche reste une performance rarement accomplie. Mrs Doubtfire ou encore Kramer contre Kramer, bien qu’ici il s’agisse plus d’un divorce de pensé que de sentiment, peuvent en être des exemples par cette double réussite, là où malheureusement Un divan à Tunis se perd quelque peu. En effet, malgré un sujet des plus actuel et engagé politiquement, le premier film de Manele Labidi manque cruellement de cette folie, d’une certaine générosité dans le dispositif qui parvient à transcender une comédie. Ainsi, on suit au cours du film Selma, diplômée de psychanalyse en France, revenir dans son pays d’origine, la Tunisie, pour y tenter d’exercer ces mêmes fonctions malgré les préjugés de ces habitants et les nombreuses contraintes administratives.
Tout ceci nous donne alors à nous spectateur une comédie séduisante, amusante sans être hilarante forcément, dépourvus de grandes ambitions si ce n’est tout de même d’évoquer un sujet, parler de gens qu’on ne voit que très peu aujourd’hui au cinéma. Le récit nous présente alors de nombreux personnages pour créer cette belle communauté de banlieue de Tunis, bien que ceux-ci soient souvent très caricaturaux, ce qui empêche alors de pouvoir s’y identifier complètement. L’intrigue est quant à elle suffisante pour capter notre attention bien qu’elle puisse manquer toujours de ce grain de folie pour que ce film arrive pleinement à se démarquer. D’autre part, la Tunisie ici au cœur du propos politique, est tournée en dérision au possible par le décalage notamment de certaines situations en comparaison avec l’occident, que ce soit d’une partie des mentalités, des voitures, ou même simplement des pauses déjeuner. Tout ceci nous rend cet univers captivant, attachant et plein d’espoir et c’est notamment par cet aspect que le film réussi son pari par le fait de pouvoir y intégrer absolument tout spectateur, quelques soit ses connaissances du propos, sans quoi l’aspect comique du film n’aurait alors que très peut fonctionner.
On observe donc ici un film très rythmé, aux dialogues bien écrits où aucune baisse de régime ne nous sort de l’histoire du début à la fin. Selma occupe toute notre attention par la légitimité du combat qu’elle mène sous nos yeux et le jeu d’acteur à souligner de Golshifte Farahani n’y est évidemment pas pour rien. Toutefois, le fond de pensé de cette comédie légère est peu identifiable tout comme les solutions proposées, les personnages sont caricaturaux, avec par exemple le policier dragueur, dur et sérieux suivi de ces acolytes simples d’esprit, la sœur rebelle entêté qui enchaîne bêtises sur bêtises, ou encore la mère réfractaire de base qui se retrouve à finalement à accepter la psychanalyse. Toute cette communauté bien qu’amusante peine à nous faire rire ou même nous toucher pleinement, l’auteur ne parvient pas vraiment à ajouter de l’épaisseur à son œuvre, à cueillir toutes les possibilités de son idée de base qui paraissait toutefois très intéressante. Un juste milieu semble ainsi vouloir être recherché sans parvenir toutefois à trouver une cohérence globale malgré toute la sympathie que l’on éprouve pour chaque personnage, ce qui donne tout de même un film plaisant et prometteur pour la jeune réalisatrice.