"Border" est probablement le film le plus surprenant de ce début d'année, et même pour ma part de ces dernières années, le plus étrange, sûrement, le plus dérangeant parfois, un film fantastique original mais aussi un beau film plein de poésie et de beauté cachée. Ce n’est pas un film d’horreur, loin de là, mais un film naturaliste dans lequel s’estompe la frontière entre humanité et animalité…Ali Abbasi, réalisateur d’origine iranienne , s’est installé en Suède au départ pour étudier l’architecture, une fois diplômé, il s'intéresse à la mise en scène et s'inscrit à la National Film School of Denmark. Border est son second long-métrage, et est adapté d'une nouvelle de John Ajvide Lindqvist, auteur entre autre du roman Laisse-entrer dont le film de vampires Morse de Tomas Alfredson est tiré. Ali Abbasi a découvert l’univers particulier de Linddqvist et a été séduit par la lecture d’un autre ouvrage plus modeste, Border qu’il a choisi de porter à l’écran. Son film a obtenu au dernier Festival de Cannes le prix Un certain Regard qui récompense un cinéma plus original et plus audacieux que la sélection officielle, et des cinéastes encore peu connus. Border est à la croisée des chemins entre conte de fées, légendes nordiques, trolls et autres créatures fantastiques, avec une nuance de thriller. Ce film atypique fait réfléchir à la notion de beauté, de normalité et d’animalité… Saluons la performance des deux acteurs personnages principaux du film qui ont accepté de prendre une vingtaine de kilos et après plusieurs heures de maquillage d’endosser chaque jour de tournage, cette laideur, corps compact et trapu, pommettes saillantes, bourrelets au dessus des orbites, dents pourries, cheveux hirsutes, ongles noirs…Eva Melander est Tina, douanière à l’efficacité redoutable, qui a la particularité de posséder un odorat extraordinaire qui lui permet de flairer la culpabilité d’un individu au travers des émotions et odeurs qu’il dégage en passant le contrôle douanier. .Elle vit au milieu des bois, avec un compagnon qui ne fait pas grand-chose à part s’occuper de chiens de combat…aucun sentiment ne les réunit…Tina nourrit un rapport privilégié avec la nature et la faune sauvage ce qui nous offre quelques magnifiques échappées de nature… Mais quand Vore (Eero Milonoff), un homme d'apparence suspecte, et au physique monstrueux, passe devant elle à la sortie du ferry où elle exerce, ses capacités sont mises à l'épreuve pour la première fois. Tina sait que Vore cache quelque chose, mais n’arrive pas à identifier quoi. Pire encore, elle ressent une étrange attirance pour lui...et ils se reniflent au sens littéral du terme…C’est le début d’une histoire qui va prendre un tour de plus en plus étrange que l’on ne peut raconter…Entre ces deux personnages mi-bête mi-humain, va se nouer une relation d’une sensualité toute primitive, alliant romantisme et vociférations bestiales, au milieu d’une nature sauvage…Une œuvre hors norme où ces deux monstres nous donnent une belle leçon de tendresse…Allez le voir !!